Shorts, tongs, nuisette... Même en cas de canicule, tout n'est pas toléré au travail

Il fait une chaleur accablante et vous êtes tentés d'aller travailler en tongs, bermuda ou nuisette... Mais si le cadre légal est peu restrictif, tout n'est pas toléré pour autant pour vous mêmes... et pour les autres.

Alors que la France fait face à un épisode caniculaire, l'avocat spécialisé en droit du travail Eric Rocheblave, rappelle à l'AFP que les seules dispositions en matière de tenues inscrites dans le code du travail concernent les "équipements de protection individuelle" (EPI).

"On ne plaisante pas avec ça, le casque qui donne trop chaud, les gants ou les chaussures de sécurité (...), il n'y a pas d'exception" même si ces équipements sont particulièrement pénibles par forte chaleur, dit-il. Dans ces situations, l'employeur peut prendre des mesures comme aménager les horaires, faire des pauses, des rotations, etc.

"Normalement c'est pantalon obligatoire mais on a un peu de liberté tant qu'on porte les chaussures de sécurité, le casque et les lunettes de protection. Il y a un peu de souplesse, on ne va pas se mettre torse-nu, mais le short est toléré", rapporte Eric Dubus, 51 ans, peintre en BTP, croisé dans le centre de Paris en short beige.

"Small", 55 ans, cordiste a, lui, "troqué le pantalon pour un pantacourt un peu large". "Nos genoux doivent être protégés", mais "c'est plus relax d'autant qu'on porte des baudriers qui serrent la taille", dit-il.

Non loin, Pascal, 53 ans, balayeur pour la mairie de Paris, a découpé les manches de son t-shirt vert pour un effet marcel, mais son gilet jaune synthétique lui tient chaud. L'interdiction du short, "c'est compréhensible quand on est à l'arrière de la benne, mais pour nous... j'aimerais bien avoir les mollets à l'air", dit-il, en précisant qu'il a des horaires aménagés et des pauses.

En dehors de ces situations spécifiques, c'est la jurisprudence et le bon sens qui prévalent.

"Eric de la compta" qui "ne voit personne et est dans un bureau enfermé à longueur de journée" pourra venir avec sa "chemisette à fleurs et son bermuda", explique Me Rocheblave. Mais dans certains cas, l'employeur peut imposer une tenue: aux salariés en contact avec la clientèle ou "pour des besoins professionnels", pour l'image de l'entreprise.

- "Cuisses poilues" -

"Il y a énormément de décisions de justice" sur ces situations du quotidien, selon Me Rocheblave, qui plaide pour "le dialogue" en la matière.

Le "dress code" doit être adapté aux conditions météorologiques et en cas de contentieux "le juge va apprécier la nature de la tâche à accomplir", poursuit l'avocat en citant comme contre-exemple le cas d'une paillote à La Grande-Motte qui ferait des fondues et imposerait une tenue savoyarde...

Le juge va apprécier "au cas par cas" la situation, dit-il. Et notamment la nuisance pour autrui, comme par exemple un décolleté ou un bermuda qui feraient "apparaître un tatouage particulier qui peut heurter".

Sans aller jusqu'à aller en justice, certains peuvent être importunés.

"Moi j'ai un sujet c'est mon boss qui porte des shorts trop courts et j'aime pas trop voir ses cuisses poilues en réunion!", rapporte ainsi sous couvert d'anonymat Laure, salariée dans une start-up.

Arrivé en short, Yusuf Sahinoglu, 26 ans, cuisinier chez "Le roi de la frite" dans la capitale, a mis un pantalon, malgré la chaleur étouffante de sa cuisine "par respect pour les clients".

"La question du short ne s'est même pas posée", rapporte aussi Pierre-Loup Tanguy, 22 ans. Tout juste sorti d'un entretien pour une alternance de "conseiller dans le luxe" en costume noir impeccable, il vient de tomber la cravate.

"Je ne me serai jamais mis en short, mes clients non plus", assure aussi François, 73 ans, en short. Mais, ajoute cet ancien commercial à la retraite, "tant qu'on se respecte, la tenue importe peu finalement".

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