Des médecins, politiques, membres d'association environnementales appellent à créer un "Giec de la pollution chimique", équivalent du groupe d'experts internationaux sur le climat, pour améliorer la connaissance des effets des produits chimiques sur la santé, dans une tribune vendredi dans Le Monde.
Sans nier les "progrès considérables" de la chimie depuis l'après-Seconde guerre mondiale, ils relèvent qu'"entre 40.000 et 60.000 produits chimiques industriels sont aujourd'hui commercialisés dans le monde" et que certains "provoquent des maladies chroniques, des troubles neurologiques, des baisses de l'immunité, des cancers, des troubles de la reproduction ou du développement et bien d'autres pathologies..."
"Les femmes enceintes et les jeunes enfants sont particulièrement vulnérables. Et pourtant, alors que la connaissance des maladies n'a jamais été aussi développée, celle des effets de la pollution chimique sur notre santé reste très lacunaire", souligne la quinzaine de signataires de la tribune.
La pollution entraînerait environ 9 millions de morts prématurées par an dans le monde, selon une estimation d'une commission du journal médical The Lancet qu'ils évoquent.
Dans les signataires du texte: le président de l'Académie de médecine Jean-Pierre Goullé, le vice-président de la Fondation de l'Académie de médecine Yves Lévi, des épidémiologistes, endocrinologue, toxicologue, deux députées de la majorité et une sénatrice LR, l'ancienne ministre de l'Environnement et avocate Corinne Lepage ou encore le porte-parole de l'association Générations futures.
Contributeurs d'un Livre blanc de la Fondation de l'Académie de médecine, intitulé "Pollution chimique de l'environnement et santé publique" et dévoilé mercredi, ils appellent à "investir très significativement pour développer la connaissance sur les expositions aux polluants chimiques et leurs produits de dégradation, mieux quantifier la part relative des expositions selon leurs sources (air, aliments, boissons, objets...), favoriser la recherche sur les méthodes et les produits alternatifs, notamment pour les phytosanitaires incriminés".
Ils jugent aussi, entre autres, que "la toxicité des mélanges doit être évaluée et (qu')il faut mesurer les effets des faibles doses avec une exposition chronique, sur la vie entière".
A l'image du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, un "GIEC de la pollution chimique", "de légitimité incontestable, publiant ses résultats chaque année, aidera les décideurs publics, et particulièrement les élus, à prévenir les risques", selon ces experts.
S'ils soulignent que le principe a été acté lors d'une conférence du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) au Kenya fin 2023, ils invitent à "accélérer" pour le concrétiser.
Dans un rapport publié vendredi, la Cour des Comptes a de son côté épinglé l'Etat pour des "insuffisances" sur le contrôle et la prévention de la pollution en cas d'accidents industriels.