Un gros cube violet attend de pied ferme les bouteilles vides à l'entrée du magasin: l'éco-organisme Citeo a amorcé jeudi, près de Nantes, le retour en France de la consigne du verre à grande échelle.
L'objectif : améliorer les performances en matière de réemploi de la France et diminuer les émissions de CO2 des emballages ménagers en incitant les clients à ramener leurs bouteilles contre 10 à 20 centimes d'euro.
L'expérimentation sera menée pendant 18 mois dans quatre grandes régions du nord-ouest du pays (Pays de la Loire, Bretagne, Normandie et Hauts-de-France) et touchera potentiellement quelque 16 millions d'habitants.
"On pose aujourd'hui la première pierre", a déclaré le directeur général de l'éco-organisme Citeo, Jean Hornain, selon qui environ 80 magasins sont entrés dans la danse, avant environ 300 d'ici le mois de juillet, et 750 avant la fin de l'année.
"L'objectif, c'est de le faire sur la France entière", a déclaré M. Hornain lors d'une conférence de presse au magasin Super U de Saint-Sébastien-sur-Loire (Loire-Atlantique), ajoutant qu'il faudra "embarquer" les consommateurs pour faire de ce geste "un réflexe".
Le déploiement, progressif, doit mener à la mise en marché de 55 millions d'emballages réemployables, selon Citeo, qui table sur 30 millions d'emballages réutilisables dès 2025 et le reste en 2026.
Sur les emballages, une petite étiquette violette "rapportez-moi pour réemploi" signale les produits consignables.
Le consommateur peut désormais rapporter son emballage dans n'importe quel magasin partenaire de l'opération, pas forcément celui où il l'a acheté.
"Le client va acheter la bouteille au même prix que sa bouteille à usage unique, mais quand il passera en caisse, il aura en plus une consigne, pour les grandes bouteilles de 20 centimes, pour les petites bouteilles de 10 centimes", explique à l'AFP Fabrice Peltier, président de Go! Réemploi, entreprise qui assure la gestion de la boucle de réemploi.
Une fois consommée, le client rapporte la bouteille dans une machine de collecte violette : "la machine lit le code-barre, la bouteille est pesée, des caméras identifient sa forme, une bouteille non consignable est refusée", explique Edouard Bernard, responsable commercial de Tomra France, producteur norvégien des machines de consigne.
- 1,5% des emballages réemployés en France -
La machine propose de restituer le montant de la consigne, soit sous forme de bon d'achat, soit en créditant la carte bancaire.
Une fois rempli le bac de la machine, Go! Réemploi va venir le récupérer pour acheminement au centre de tri et de lavage.
En train de récapituler sa liste de courses au bout du rayon soupes, Claudie Tougeron, 63 ans, est enthousiaste : "le recyclage du verre, ce n'est pas très écologique, la consigne, il n'y a rien de mieux !".
"Pour la planète et l'écologie, c'est sûrement très bien, mais j'ai un peu peur au niveau de l'hygiène", explique pour sa part Françoise Caron, 79 ans, qui a pourtant pratiqué la consigne dans sa jeunesse, avant la ruée vers les emballages plastiques.
Les technologies de lavage "sont totalement maîtrisées", assure Yann Priou, directeur général de la laverie voisine Bout' à Bout', à Carquefou (Loire-Atlantique).
Devant le tapis roulant qui emporte les bouteilles au lavage, il rappelle que "tout le monde utilise déjà des bouteilles réemployées" dans les cafés, hôtels et restaurants.
Les bouteilles sont d'abord triées à la main: placées sur un tapis roulant, elles sont pré-lavées, puis plongées dix minutes dans un bain d'eau et de soude à 80 degrés, avant d'être désinfectées, rincées et séchées.
Elles sont ensuite "contrôlées dans leur intégrité physique": en cas de défaut rédhibitoire, elles sont envoyées au recyclage, sinon elles sont remises sur des palettes et renvoyées chez les industriels, explique M. Priou.
Plus de 50 industriels, dont de nombreux brasseurs, sont engagés dans l'opération, avec huit distributeurs.
Huit références de boissons et soupes étaient disponibles jeudi en magasin, mais ce chiffre a vocation à atteindre plusieurs dizaines, selon Citeo.
L'objectif fixé par la loi Agec (anti-gaspillage économie circulaire) était de 10% d'emballages réemployés d'ici à 2027, avec un objectif intermédiaire de 5% pour 2023. Mais le réemploi plafonne à 1,5%, selon les derniers chiffres de l'observatoire dédié.
Pour y remédier, Citeo espère un taux de retour des emballages vides autour de 50% au démarrage, puis à terme au-dessus de 80%.
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