Donner "du muscle" à un texte "trop flou": c'est l'ambition du Sénat qui examinera mardi en première lecture, après l'Assemblée nationale, le projet de réformant l'assurance-récolte, face à la multiplication des risques climatiques.
Cette réforme veut "créer la ceinture de sécurité des agriculteurs face aux accidents climatiques" - grêle, gel, sécheresse... - dont "la fréquence et l'intensité sont en augmentation", a plaidé le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie, le mois dernier devant les députés.
Succession de sécheresses depuis 2018, gel tardif du printemps 2021... Pour le rapporteur du texte au Sénat Laurent Duplomb (LR), une refonte du système actuel est justifiée pour permettre "de mieux faire face aux risques climatiques de demain".
Mais il juge le projet de loi "trop flou" et déplore l'absence d'indication de budget, même si le président Emmanuel Macron s'est engagé à doter le système de 600 millions d'euros par an, soit un doublement par rapport à l'enveloppe actuelle.
"Si on veut créer la confiance des agriculteurs, il faut quand même quelques certitudes", a déclaré le rapporteur à l'AFP.
L'architecture du projet de loi compte trois niveaux.
Il prévoit que les agriculteurs assument sur leurs propres deniers les pertes les plus modestes (jusqu'à 20%). Puis interviennent les assurances jusqu'à un seuil à définir, et enfin l'État pour les sinistres "d'ampleur exceptionnelle".
Pour inciter les agriculteurs à s'assurer, le texte prévoit que même en cas de pertes lourdes, les non-assurés seront nettement moins bien indemnisés.
Pas question pour le rapporteur de "laisser toutes les clés du camion au gouvernement".
Pour "donner un peu plus de visibilité au système", et "assurer une certaine stabilité", il propose notamment "l'impossibilité pour le gouvernement de modifier les taux dans les cinq premières années".
Les sénateurs ont également introduit en commission un dispositif pour pousser les jeunes exploitants à souscrire une assurance multirisque climatique, dès leur entrée en activité.
La dotation jeune agriculteur serait ainsi minorée en cas de non souscription.
L'indemnisation des pertes de récolte repose actuellement sur le fonctionnement parallèle, voire concurrent, de deux régimes.
Le premier, cofinancé par les agriculteurs et l'Etat, exclut certains pans de l'agriculture (viticulture et grandes cultures) et ses délais sont jugés trop lents.
Le second est le système assurantiel privé mais subventionné à 65% par l'Etat, déficitaire et encore peu souscrit par les agriculteurs.
Un dispositif qui n'est plus suffisamment robuste pour faire face à des aléas climatiques de plus en plus fréquents et importants.