Recyclage du plastique: la France accueillera deux usines américaine et canadienne

Les deux gros projets industriels de recyclage de déchets plastiques, annoncés en France, par le groupe américain Eastman et le quebecois Loop associé à Suez, devraient aider le pays à rattraper une partie de son retard en matière de recyclage du plastique.

Les deux usines prévues représentent plus d'un milliard d'euros d'investissement (850 millions pour Eastman et 250 millions d'euros pour Loop), soit un quart des 4 milliards d'euros annoncés par 21 entreprises étrangères dans le cadre du programme d'attractivité Choose France annoncé dimanche soir.

Eastman, qui n'a pas dévoilé le lieu de son implantation, a souligné qu'il construirait "la plus grande usine de recyclage moléculaire de plastiques du monde" afin de "développer l'économie circulaire".

Loop prévoit de s'installer à Port-Jérôme-Sur-Seine (Seine-Maritime) en Normandie sur une parcelle de 130.000 mètres carrés où la construction devrait démarrer en 2023, pour une mise en service "18 mois plus tard" environ, soit en 2025, a indiqué à l'AFP son patron Daniel Solomita.

"Nous visons notamment les PET blancs opaques des bouteilles de lait et d'autres déchets plastiques comme les barquettes alimentaires qui ne sont pas bien recyclés aujourd'hui", a indiqué M. Solomita. Le PET (polytéréphtalate d'éthylène) est l'un des plastiques les plus utilisés dans le monde, notamment pour la fabrication de bouteilles et de fibres polyester.

Les "gisements" lui seront fournis par Suez, son associé, spécialisé dans le tri et le traitement des déchets. L'usine aura une capacité de production de quelque 70.000 tonnes de résine PET par an.

En choisissant la Normandie, le groupe, qui prévoit la création de 180 emplois à terme, compte sur l'accès à la Seine pour drainer les déchets par transport fluvial de tout le bassin parisien.

Loop utilise "sept technologies différentes" brevetées de "dépolymérisation à basse température" lui permettant de retrouver la cellule "monomère de base" et de refabriquer ainsi en boucle fermée du plastique de qualité comparable à du plastique neuf issu de la pétrochimie, a indiqué M. Solomita.

Loop a aussi passé des accords avec trois industriels français de l'agroalimentaire et des cosmétiques, Danone, L'Oréal et L'Occitane, qui achèteront le plastique recyclé pour leurs emballages, "ce qui permettra d'instaurer la circularité", a-t-il ajouté. Ils visent tous de parvenir à 100% de leurs emballages d'origine recyclée ou bio-sourcée d'ici à 2025 (L'Occitane) ou à 2030 (Danone, L'Oréal).

- Bientôt, les pots de yaourt ? -

L'usine française d'Eastman, dont le siège social est basé dans le Tennessee, devrait employer 350 personnes à partir de 2025 pour recycler 160.000 tonnes par an en se concentrant aussi sur des plastiques difficiles à recycler, y compris des déchets textiles. Soit près de 10% des 2 millions de tonnes de déchets plastiques produits en France chaque année, dont la grosse majorité est incinérée ou enfouie.

Le groupe indique avoir reçu des lettres d'intentions de LVMH, Estée Lauder, Clarins, Procter & Gamble, L'Oréal ou Danone souhaitant s'approvisionner en plastique recyclé sur leur futur site.

Jusqu'à présent, le recyclage mécanique, un tri très fin du plastique mais qui ne va pas jusqu'à la molécule elle-même et produit du plastique de qualité inférieure, constitue la grosse majorité du recyclage en France.

Avec ces projets, les pouvoirs publics espèrent réduire les exportations françaises de déchets plastiques, qui s'élevaient à 750.000 tonnes en 2020 selon l'Ademe. En tous cas, améliorer le taux de recyclage des emballages plastiques, inférieur à 30% en France, à la différence des pays voisins.

Ces annonces ne permettent pas (encore) de s'attaquer aux pots de yaourt, ni à celui des barquettes de viande et de poisson, qui sont en polystyrène plat ou expansé, molécule qui nécessite d'autres procédés industriels.

"Nous avons bon espoir de voir aboutir des projets d'ici la fin de l'année", a indiqué une source ministérielle jointe par l'AFP.

Le PDG d'Eastman, Mark Costa, a été reçu à l'Elysée lundi. Emmanuel Macron s'est ensuite rendu sur le lieu d'une autre des annonces d'investissement étranger en France dévoilée dimanche soir, sur le site de Chalampé dans l'Est, où le chimiste allemand BASF va produire... du plastique.

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