Faut-il construire à Fessenheim, près de l'ancienne centrale nucléaire fermée en 2020, une usine de recyclage de métaux très faiblement radioactifs? La question soulève de vifs débats de santé publique, a souligné lundi la Commission nationale du débat public (CNDP), relayant des interrogations sur l'"acceptabilité" du projet.
Dans son bilan du débat organisé à propos de ce projet de "Technocentre" porté par EDF - et qui a mobilisé 2.675 participants entre octobre et février -, la CNDP souligne que "la question des très faibles doses et de leur acceptabilité - sociale autant que sanitaire - a été centrale et âprement discutée".
Le débat a fait resurgir "des rapports de force et des points de vue antinomiques relatifs à la production électrique nucléaire", souligne en introduction de ce rapport de 92 pages Jean-Louis Laure, qui a présidé la commission chargée d'organiser et d'animer les échanges.
L'"absence" de certitude quant à des "risque de contamination" en cas de contact fréquent avec les métaux radioactifs concernés, souligne le rapport, a été "mentionnée par différents contributeurs comme une raison suffisante de ne pas permettre l'utilisation" des lingots d'acier susceptibles d'être fabriques à Fessenheim, et destinés à être employés à tout type d'usage.
Ces métaux, issus du démantèlement d'installations nucléaires partout en France, seront "disséminés sans aucune traçabilité" et "finiront en objets de la vie courante qui diffuseront des très faibles doses de radioactivité", s'est ainsi inquiétée au cours du débat l'association Stop Fessenheim. Ses militants ont défendu le maintien de "l'exception française" en matière de non-réutilisation de ces métaux.
A l'inverse, EDF a rappelé que l'impact de ces métaux, en terme de radioactivité sera "inférieur à 0,01 millisievert (mSV) par an, ce qui correspond à 300 fois moins que l'exposition annuelle liée à la radioactivité naturelle". Ce niveau justifie l'absence de traçabilité des lingots ainsi produits, selon l'entreprise.
Pour se concrétiser, le projet devra faire l'objet d'un arrêté ministériel de dérogation au code de la santé publique, et d'un arrêté préfectoral d'autorisation. Pour ce faire, une enquête publique doit avoir lieu en 2025-2026.
Une telle usine serait une première en France. En Europe, d'autres pays (Suède, Royaume-Uni, Espagne, Suisse) pratiquent déjà le recyclage des métaux très faiblement radioactifs.