L'agriculture, très consommatrice d'eau, n'aura pas à baisser ses prélèvements pour irriguer les cultures, a affirmé le ministre de l'Agriculture jeudi devant le syndicat majoritaire FNSEA à Angers, au moment où Emmanuel Macron présentait un "plan de sobriété" sur l'eau dans les Alpes.
"Je suis heureux de l'arbitrage qu'on a, qui est un arbitrage de dire +stabilisation des prélèvements+, donc on ne redemande pas un effort supplémentaire" aux agriculteurs, a déclaré M. Fesneau au dernier jour du congrès de la fédération agricole majoritaire.
Avec le changement climatique, "sans doute on aura besoin de plus de surfaces à irriguer". Ce qui implique, à prélèvements constants, de consommer moins d'eau à l'hectare, a-t-il brièvement esquissé, mentionnant une forme de "sobriété à l'hectare".
Au même moment, le chef d'Etat annonçait qu'"un plan de sobriété sur l'eau" serait demandé "à chaque secteur" d'"ici à l'été", lors de la présentation dans les Hautes-Alpes de sa stratégie de gestion de l'eau.
Selon le ministre, l'agriculture est toutefois affranchie d'un objectif de baisse des prélèvements.
"On doit faire plus d'irrigation avec la même quantité d'eau que nous utilisons aujourd'hui", a expliqué pour sa part le président.
L'agriculture est la première activité consommatrice d'eau en France avec 58% du total, devant l'eau potable (26%).
Selon un récent rapport sénatorial, "environ 20% des exploitations agricoles sont équipées d'un système d'irrigation (soit environ 75.000 irrigants)" et "60% des surfaces irriguées concernent des productions de maïs".
"On ne prélèvera pas moins, pas plus. Il va y avoir une stabilisation pour l'agriculture", a constaté avec satisfaction Christiane Lambert, présidente sortante de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA).
Quelques jours après la violente manifestation contre la mégabassine de Sainte-Soline (Deux-Sèvres), le président a validé l'utilité de ces retenues, tout en disant jeudi vouloir mieux en "répartir les usages" et conditionner leur utilisation à des pratiques d'économies d'eau et de pesticides.
"Parler de sobriété ne nous fait pas peur. Nous sommes déjà engagés. De 2000 à 2023, nous avons déjà réduit de 54% les utilisations de produits phytosanitaires", a affirmé Mme Lambert.
"Tout ça on le fait déjà", "finalement, rien ne change pour nous", pouvait-on entendre dans les allées du congrès après les annonces présidentielles, relayées par Marc Fesneau.
Evoquant la mobilisation anti-bassine de Sainte-Soline, le ministre a de nouveau critiqué élus et syndicats qui "s'associent à ces mouvements qui n'ont d'autre but que la violence et la destruction" et "déshonorent leur responsabilité".
"Oui, il faut dissoudre le mouvement [anti-bassines] Les Soulèvements de la terre", a plaidé la patronne de la FNSEA. Elle a appelé à "cesser d'être complaisants avec les partis et les syndicats qui détruisent les outils de production de leurs collègues agriculteurs", citant la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole français, classé à gauche.
A l'extérieur du palais des congrès, des militants du mouvement écologiste Extinction rebellion ont brièvement déployé une banderole clamant "FNSEA = Agriculture à l'agonie. Notre avenir c'est l'agroécologie".
Parmi eux, "Günther", jeune maraîcher, déplorait "la défense d'un productivisme" mortifère: "On doit tous réduire notre empreinte. Moi je paille mes sols, je plante des arbres pour limiter l'évaporation [de l'eau des plantes]. Ici, on veut que rien ne change."