Des milliers de sites industriels vont devoir mener une campagne "d'identification et d'analyse" de leurs rejets de PFAS, ces produits chimiques surnommés "polluants éternels" qui inquiètent de plus en plus, selon un arrêté publié mardi au Journal officiel.
Le texte définit ainsi "les modalités d'une campagne d'identification et d'analyse des substances per- ou polyfluoroalkylées qui doit être mise en oeuvre pour les rejets aqueux de certaines installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation".
Il prévoit que 20 substances PFAS seront obligatoirement analysées.
Quasi indestructibles, les substances per- et polyfluoroalkylées ou PFAS (une famille regroupant plus de 4.700 molécules) s'accumulent avec le temps dans l'air, le sol, les eaux des rivières, la nourriture et jusqu'au corps humain, d'où leur surnom de polluants "éternels".
En France, ils font l'objet d'inquiétudes croissantes, notamment dans la "vallée de la chimie" près de Lyon, et plusieurs procédures judiciaires ont été engagées par des ONG et des particuliers. Aux Etats-Unis, de grands groupes chimiques comme 3M, DuPont, Chemours ou Corteva ont récemment dû verser des milliards de dollars à la suite de contaminations de l'environnement.
L'arrêté ministériel prévoit que l'entreprise doit établir "sous trois mois, la liste des substances PFAS utilisées, produites, traitées ou rejetées par son installation, ainsi que des substances PFAS produites par dégradation". Elle doit mener "une campagne d'identification et d'analyse des substances PFAS sur chaque point de rejets aqueux".
Le ministère de la Transition écologique précise dans un communiqué qu'"environ 5.000 sites sont concernés par la réalisation de cet état des lieux". La campagne est "ciblée sur les secteurs industriels les plus susceptibles de rejeter ces substances": chimie, traitement textile, traitement de surface, papeterie, stations d'épuration ou encore secteur des déchets.
La démarche prévoit "une première phase de trois campagnes mensuelles de mesures des PFAS dans les rejets" et "s'étendra sur 9 mois pour tenir compte de la disponibilité et des capacités des laboratoires qui vont réaliser ces prélèvements et analyses", détaille le ministère.
Les modalités d'une "surveillance pérenne" seront ensuite précisées en fonction de cette première phase de diagnostic.
Contactée par l'AFP, l'ONG Générations Futures, en pointe sur la question des PFAS, a émis plusieurs critiques sur l'arrêté.
La campagne doit "être élargie" à toutes les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et pas seulement celles soumises à autorisation, prône François Veillerette, son porte-parole.
Il faut également "rechercher plus de substances" et "utiliser des méthodes d'analyse beaucoup plus sensibles et avec des limites de quantification bien plus basses que celles proposées", ajoute-t-il.
En avril, un rapport de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) avait recommandé au gouvernement d'agir "sans tarder" sur des produits dont le "caractère cancérigène est suspecté".
"La réglementation française des émissions industrielles encadre encore trop peu les rejets en PFAS et leur suivi en banques de données est quasi inexistant", s'inquiétaient notamment les auteurs.
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