Plastiques recyclés: une start-up résout le casse-tête du tri avec des électrons

Recycler les plastiques utilisés dans les automobiles, l'électroménager ou les appareils électroniques: une start-up française, Skytech, a choisi ce marché en développement en s'appuyant sur une technologie de tri innovante basée sur la "tribo-électricité".

La société s'approvisionne auprès de recycleurs en déchets mélangés de trois sortes de plastiques, ABS (acrylonitrile butadiène styrène), polystyrène (PS) et polypropylène (PP). Ces résines ont la même densité et ne peuvent donc être séparées par le procédé traditionnel de tri par flottaison.

"Ces plastiques aujourd'hui s'ils ne sont pas retraités (...) vont être incinérés ou envoyés en décharge", explique à l'AFP le PDG de Skytech, Arthur Rozen.

La première étape du retraitement développé par Skytech emploie la tribo-électricité, une technologie reposant sur la capacité des plastiques à se charger électriquement quand ils se frottent entre eux, comme chaque écolier en a fait l'expérience avec l'électricité statique et une règle en plastique.

Sur la chaîne, les copeaux de déchets plastiques, chauffés et mélangés, se chargent positivement et négativement et peuvent alors être séparés en les faisant passer dans un champ électrique.

Les particules sont ensuite fondues pour former des petites billes des différentes résines plastiques. Ce sont ces granules qui sont vendues aux utilisateurs finaux comme les plasturgistes pour refabriquer des pièces.

Ces résines recyclées présentent les mêmes propriétés mécaniques, ou très proches, du plastique de base, souligne M. Rozen: "on peut remplacer la résine vierge par notre résine à 100%".

La technologie de tri par tribo-électricité existait déjà, mais Skytech souligne l'avoir améliorée et a déposé des brevets en ce sens.

"Ce qui est compliqué, c'est d'avoir une pureté de 99% sur l'ABS avec un débit à 1.500 ou 2.000 kilos par heure (...) Des grandes puretés avec des débits importants", ce que réalise Skytech, explique le PDG.

L'approvisionnement en plastique à recycler n'est plus un problème depuis que la Chine a fermé ses frontières, laissant beaucoup plus de ressource en Europe.

Le prix de ces résines recyclées est aujourd'hui environ 20% inférieur à la résine vierge, note M. Rozen. La majorité de la production de Skytech est exportée, dont 60-70% vers l'Asie. "Le pays du plastique, c'est la Chine", résume-t-il.

Skytech, qui est détenu par le fonds Xerys, vise la place de leader européen sur ces types de plastiques recyclés, où il est déjà un des deux principaux acteurs, selon son PDG.

- Former pour embaucher -

Cette ambition se traduit dans la stratégie de développement de l'entreprise, qui prévoit des investissements de 15 millions d'euros.

La production, qui a débuté à l'automne 2020, tourne maintenant en trois équipes. Mais Skytech va quitter son implantation actuelle dans une ancienne usine Singer à Bonnières-sur-Seine (Yvelines) pour un nouveau site plus grand.

L'entreprise va s'installer à Aubevoye (Eure) sur 20.000 m2. Les travaux débuteront cet été pour une installation début 2022.

Skytech passera de une à trois lignes de fabrication, soit une capacité triplée, à 35.000 tonnes en 2023 contre 10.000 actuellement.

Cette croissance va impliquer dans un premier temps une cinquantaine d'embauches sur 2022-2023, ce qui portera les effectifs de l'entreprise à 90 personnes, a indiqué Ophélie Godde, directrice des opérations.

Pour pallier les difficultés de recrutement dans une région qui n'est pas une vallée de la plasturgie, Skytech a mis en place son propre cycle de formation, avec l'aide locale de Pôle Emploi qui a proposé des candidats.

"Il fallait qu'on se positionne comme un centre de formation à nos métiers, et plus particulièrement aux métiers de la tribo-électricité qui est une technique particulière", raconte Mme Godde. "Pendant deux mois, Skytech s'est organisé en école".

La société a déjà recruté sept personnes qui avaient déjà "la connaissance du milieu industriel, du rythme de travail en 3X8, et du travail sur des process mécaniques", explique-t-elle.

"C'est vraiment très prometteur. Pour les embauches qu'on envisage sur 2022, on va reproduire le même schéma", ajoute-t-elle.

Et au-delà Skytech vise un développement international avec deux autres sites en Europe, pour une capacité de production qui passerait à 150.000 tonnes à l'horizon 2025.

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