La France a mis à profit le sommet de l'ONU sur les océans à Nice pour présenter un plan contre la pollution plastique, dans l'espoir de perdre enfin son bonnet d'âne européen en matière de recyclage qui lui coûte 1,6 milliard d'euros de pénalités chaque année.
L'Europe a fixé un objectif de recyclage du plastique de 50% en 2025 et 55% en 2030, mais "la France n'est actuellement qu'à 26% et ce taux progresse trop lentement" (+1% en moyenne chaque année), a expliqué le ministère de la Transition écologique en présentant son "plan plastique 2025-2030".
"La France est un mauvais élève en matière de recyclage plastique: elle est 26e sur 27 États membres, et elle peut certainement faire beaucoup mieux" a souligné la ministre Agnès Pannier-Runacher à Nice.
Résultat, "la France doit chaque année verser à l'Europe plus de 1,6 milliard d'euros pour les 1,9 million de tonnes d'emballages plastiques non recyclés".
Au total, le pays produit 4,5 millions de tonnes de déchets plastique chaque année, soit 70 kg par an et par habitant.
- montrer l'exemple -
Pour inverser la tendance, l'État français entend d'abord montrer l'exemple: il "mettra fin à l'achat de bouteilles et d'emballage pour boisson contenant du plastique d'ici 2026".
Quant à la stratégie des 3R engagée en 2022 pour "réduire, réemployer et recycler" les emballages à usage unique, elle est en cours de révision et "ses ambitions seront renforcées" dans un décret fin 2025, selon le ministère.
L'option d'instaurer une consigne sur les bouteilles de plastique et les canettes d'aluminium, demandée samedi par Emmanuel Macron, soutenue publiquement mardi par l'éco-organisme qui organise la gestion des ordures ménagères, Citeo, mais vivement contestée par les collectivités locales, n'apparait pas dans le plan.
Celui-ci prévoit "un dispositif de réemploi mutualisé pour les emballages alimentaires en grandes surfaces" à partir de 2026, sur la base d'expérimentations lancées jeudi dans l'Ouest et le Nord de la France, et "un soutien financier", non chiffré, pour "l'innovation et le développement d'emballages réemployables".
Il vise aussi à "l'instauration d'une prime à l'incorporation de plastiques recyclés dans les produits", un "mécanisme de bonus/malus" pour réduire le taux des emballages non recyclables (35% actuellement), et d'autres aides pour "développer l'industrie du recyclage et créer des emplois".
Ces aides seront financées "à partir de l'éco-contribution prélevée" sur les produits mis sur le marché, précise le ministère, qui représente 1,6 milliard d'euros par an -dont 1,5 milliard pour Citeo.
- "plages sans déchets plastiques" -
La France demandera aussi à Bruxelles une "évolution du droit européen" pour soumettre les produits importés "aux mêmes exigences environnementales".
Côté gestion des déchets, les règles de tri et couleurs des bacs seront "harmonisées d'ici 2027".
Les communes du littoral vont être incitées à signer une charte "plages sans déchets plastique", faisant la promotion d'une quinzaine de gestes concrets: accompagnement des acteurs du tourisme, campagnes de ramassage de déchets, facilitation de l'accès à l'eau potable, consignes de contenants alimentaires... 111 collectivités l'ont déjà signée.
Dans la foulée, la ministre a annoncé mettre en consultation "dans les prochains jours" un décret sur les filtres à microplastiques dans les lave-linge.
Le but est de retenir les milliards de microplastiques textiles relâchés par les machines à laver qui contaminent ensuite l'ensemble de la chaîne alimentaire dans les cours d'eau et les océans.
Les ONG Zero Waste France et Surfrider ont "regretté" un plan gouvernemental "bien en deçà des enjeux" qui pèsent sur "l'engrenage de la pollution plastique", car il ne comprend "ni objectifs concrets, ni calendrier, ni budget". Le plan est "trop centré sur le recyclage et passe à côté de l'essentiel: la réduction à la source", relève Surfrider.
L'association Amorce qui regroupe les collectivités locales chargées notamment de l'organisation de la collecte des déchets a salué pour sa part le fait "que le gouvernement n'ait pas retenu le dispositif de fausse consigne sur les bouteilles plastiques porté par les multinationales de l'eau et des boissons", dont les "seuls objectifs réels" étaient de "poursuivre le développement de milliards de bouteilles plastique jetables". Amorce demande "la fixation d'objectifs contraignants de réduction et de recyclage".