Un rectangle de la taille d'un corps recroquevillé, "place réservée aux sans-abri": des bénévoles de la fondation Armée du salut ont marqué à la peinture les trottoirs de Paris pour sensibiliser à la fermeture de places d'hébergement d'urgence avec la fin de la trêve hivernale.
"A partir du 31 mars, des milliers de personnes perdront leur place d'hébergement hivernal", rappelle la fondation dans des messages peints à même le trottoir dans la nuit de mercredi à jeudi, à quelques jours de cette date redoutée pour de nombreux sans-abri.
Cette campagne vise à "s'indigner de la situation des personnes qui vivent dans la rue" et à susciter une prise de conscience, explique Samuel Coppens, porte-parole de la fondation.
Jeudi matin, Satenik, ancienne bénéficiaire de l'Armée du Salut devenue coordinatrice, s'activait avec d'autres bénévoles et des personnes en situation de précarité pour dessiner les derniers des 18 marquages au sol.
Cette Arménienne de 23 ans est arrivée en France en mars 2015 pour rejoindre son mari. Aucune place n'était disponible pour eux le premier mois, puis dès avril "le 115 (le Samusocial, ndlr) m'a dit qu'il faisait beau maintenant, qu'il y avait plein de parcs où je pourrais dormir", raconte-t-elle à l'AFP.
Après six mois passés dans la rue, elle et son mari ont finalement obtenu une place dans un centre d'hébergement. Depuis, ils ont eu un enfant, leur situation s'est arrangée et leur demande de logement social est en cours de traitement.
"Aujourd'hui, il faut être une femme, mère d'un enfant de moins de trois ans pour espérer avoir une place d'hébergement d'urgence. Sinon, c'est quasi-impossible", assure Louis Ngwabije, directeur d'un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) à Paris.
Au 31 mars, 275 personnes hébergées par la fondations de l'Armée du Salut en France se retrouveront sans solution d'hébergement, ce qui rompt avec "le principe de continuité de la prise en charge prévue par la loi", dénonce-t-elle.
Dans le cadre du plan hiver, 14.000 places d'hébergement ont été ouvertes du 1er novembre au 31 mars en France. Le ministre du Logement Julien Denormandie a annoncé mercredi que 6.000 d'entre elles seraient pérennisées, portant à 145.000 le nombre de places ouvertes toute l'année.