Pesticides: les distances de protection retenues "insuffisantes" pour les ONG

Les distances minimales que souhaite fixer le gouvernement entre les habitations et les zones d'épandage de produits phytosanitaires sont "vraiment insuffisantes", ont protesté samedi plusieurs organisations écologistes.

"Les mesures proposées sont vraiment insuffisantes, au vu de ce que dit l'Anses, au vu des études scientifiques", a déclaré à l'AFP Thibault Leroux, chargé de mission agriculture à France Nature Environnement (FNE).

Des premières versions du décret ont circulé avant l'été et FNE s'attendait à "un fort lobbying du secteur agricole". "C'est assez décevant de voir qu'au sein du gouvernement, c'est le ministère de l'Agriculture qu'on écoute, avant les enjeux sanitaires et environnementaux", a regretté Thibault Leroux.

Le gouvernement va soumettre à consultation lundi un projet de décret s'appuyant sur les recommandations scientifiques de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Les distances proposées dans ce projet seront de 5 mètres pour les cultures dites basses comme les légumes et de 10 mètres pour les cultures hautes, telles que les céréales.

FNE va participer à cette consultation et mise sur une "mobilisation des citoyens" pour faire bouger les lignes.

"Je n'y crois pas, je pense que c'est un poisson d'avril", a réagi sur BFMTV Yann Arthus-Bertrand, président de la fondation Good Planet. "Je ne peux pas croire qu'aujourd'hui les lobbyistes soient plus forts que la santé de la population. C'est insultant pour les gens qui se battent depuis si longtemps contre les pesticides".

"5 ou 10 mètres (...) ne représentent absolument pas une distance susceptible de réduire de manière significative l'exposition des riverains aux pesticides : c'est moins que la largeur d'un chemin rural et de ses bordures !", a renchéri, dans un communiqué, le directeur de l'ONG Générations futures, François Veillerette.

Il appelle le gouvernement à "ne pas céder à la pression de la FNSEA sur ce sujet" et à "protéger la santé des personnes face à ces produits dont beaucoup sont des perturbateurs endocriniens".

David Cormand, secrétaire national d'Europe Ecologie Les Verts, reconnaît un caractère "historique" à cette décision du gouvernement: "c'est la première fois que l'Etat admet qu'il y a un danger grave pour les gens" après l'épandage, a-t-il souligné sur BFMTV. Mais "le problème, c'est le côté anecdotique de la décision qu'ils en tirent": "une zone tampon de 5 à 10 mètres, ça n'a pas de sens".

Le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume s'était opposé mercredi à l'idée d'une interdiction générale de traitement par des produits phytosanitaires dans une zone uniforme de 150 mètres autour de bâtiments habités, proposée par des maires et des associations.

"S'il devait y avoir des zones de non traitement de 150 mètres", "nous serions obligés d'acheter de l'alimentation venue d'ailleurs" tellement une telle mesure réduirait les surfaces agricoles et le potentiel de production alimentaire en France, a-t-il dit sur Europe 1.