Les députés ont approuvé mercredi en commission la réintroduction dérogatoire d'un insecticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France mais autorisé ailleurs en Europe.
Cette mesure constitue l'une des dispositions les plus irritantes de la proposition de loi venue du Sénat visant à "lever les contraintes" pesant sur le métier d'agriculteur, qui sera débattue fin mai dans l'hémicycle.
L'acétamipride, un pesticide nocif pour les pollinisateurs, est interdit en France depuis 2018 mais reste utilisé dans plusieurs autres pays de l'Union européenne jusqu'en 2033, notamment sur la betterave ou la noisette.
Les députés de la commission des Affaires économiques ont donné leur feu vert pour que cet insecticide puisse être autorisé par décret, pour une durée limitée de trois ans, et à titre "dérogatoire" pour certaines filières en situation d'impasse.
Certaines conditions sont prévues comme l'engagement de la filière dans "un plan de recherche d'alternatives".
A l'unisson, les députés de la gauche ont dénoncé un grave retour en arrière et une atteinte à la santé.
"Ces pesticides sont particulièrement toxiques et connus pour être des tueurs d'abeilles", a dénoncé la députée LFI Mathilde Hignet.
Cela "représente une catastrophe pour la biodiversité, la santé des agriculteurs et des riverains", a-t-elle ajouté.
A contrario, le rapporteur du texte, le député LR Julien Dive a défendu une mesure qui "apporte une solution ponctuelle pour un usage précis à une filière qui ne dispose pas d'autre solution et qui se retrouve pénalisée par rapport à ses voisines européennes".
Sans y parvenir, les députés RN ont tenté de lever complètement l'interdiction.
Le texte dans son ensemble, défendu par la droite et l'extrême droite, mais rejeté par la gauche, divise les députés du bloc central: ils sont partagés entre revendications d'une partie du monde agricole et inquiétudes pour l'environnement et la santé.
Plus tôt, ce sont eux qui ont fait la bascule contre une série de dispositions venant contraindre l'Anses, l'agence sanitaire en charge d'évaluer la dangerosité des pesticides et leur autorisation en France.
Par exemple, la commission a rejeté une mesure qui imposait à l'Anses des priorités dans l'ordre d'évaluation des produits pesticides et donc de leur éventuelle autorisation ou interdiction.
Une "ligne rouge" constituant une grave "atteinte à l'indépendance de la science", selon les mots du député socialiste Dominique Potier.
Lors de son audition à l'Assemblée nationale le 25 mars, le directeur général de l'Agence, Benoît Vallet, avait expliqué aux élus que l'adoption de cette disposition entraînerait sa démission.
Au cours des débats, le député Richard Ramos a dénoncé les menaces exercées par la FNSEA, le syndicat historique, qui a, selon lui, appelé à "murer" les permanences des députés MoDem ou "même à aller chez eux".