A Paris, le Secours populaire veut encourager les étudiants à mieux manger

Couteau à la main, une quinzaine d'étudiants s'affairent autour d'une longue table en bois. Leur défi: préparer ensemble avec l'aide d'un chef un plat sain, économique et goûteux, qu'ils pourront éventuellement reproduire chez eux.

Au menu: du poulet croustillant, avec une sauce tigre épicée et de la purée de pommes de terre. Un plat "branché et bon pour la santé", assure Xavier Pincemin, ancien vainqueur de l'émission "Top chef", qui anime cet atelier, organisé en ce début d'année universitaire par la Fédération de Paris du Secours populaire. Coût de la portion ? Environ trois euros, selon lui.

Pour préparer la sauce, certains jeunes émincent de la coriandre, d'autres taillent du gingembre, quelques-uns découpent finement des piments rouges. Les odeurs d'épices imprègnent la salle du restaurant du Rosa Bonheur, un établissement situé dans le XIXe arrondissement parisien.

"Je ne cuisine pas souvent mais j'essaie d'apprendre", explique à l'AFP Rochen, 19 ans, étudiant en gestion des entreprises et des administrations, tout en manipulant avec attention son couteau éminceur. "C'est important et c'est pour ça que je suis venu".

Ses voisins de table versent de la sauce soja et de l'huile de sésame dans de grands bols. Chacun récupère ensuite dans un saladier géant un blanc de poulet à découper en longueur. Le brouhaha des conversations remplace peu à peu les claquements des couteaux sur les planches.

"L'idée c'était de sortir les étudiants de leur quotidien, la cuisine permet à la fois de créer du lien social et de reprendre plaisir à manger", souligne auprès de l'AFP Abdelsem Ghazi, secrétaire général de la Fédération de Paris du Secours populaire, qui tient dans la capitale trois permanences dédiées aux étudiants en difficulté. Celles-ci ont reçu l'an dernier plus de 500 jeunes, un nombre en nette hausse.

- Produits de base -

La précarité étudiante s'est enracinée en France depuis les années 2000, selon un rapport parlementaire publié au début du mois. Pour lutter contre cette situation, ce document recommande de réformer le système des bourses afin de le rendre plus redistributif.

Pour les jeunes, le budget dédié à l'alimentation est souvent une variable d'ajustement, faute d'alternative.

Siaka Sylla, 25 ans, étudiant en gestion des ressources humaines, a pris "l'habitude de beaucoup cuisiner": "comme ça, je fais des économies", indique-t-il à l'AFP, après avoir participé à la préparation du poulet croustillant. Il bénéficie aussi de l'aide du Secours populaire.

Selon un récent baromètre de l'association spécialisée Cop1, 16% des étudiants déclarent avoir déjà eu recours à l'aide alimentaire.

De l'autre côté de la salle du restaurant, un second groupe prépare un plat de pâtes maison à la sauce tomate et à la mozzarella, avec l'aide du chef étoilé italien Simone Zanoni.

"On peut bien manger avec des produits de base", "c'est accessible à tous", observe auprès de l'AFP Jimmy Mohamed, médecin et animateur, qui a proposé aux étudiants un quizz sur l'alimentation avant les ateliers.

Pour le premier groupe, il temps de passer à la cuisson du poulet. Les participants se serrent dans la cuisine située au sous-sol de l'établissement. Le chef guide l'un de ses brigadiers du jour dans l'utilisation de la friteuse. Et vient enfin l'heure de goûter le plat.

"On s'est bien coordonnés pour faire la recette", se réjouit auprès de l'AFP Sindia, 20 ans, à l'issue de la dégustation. "Je voudrais la refaire !". Habituellement, cette étudiante infirmière achète "peu de viande car c'est cher" et privilégie "des plats de riz et légumes", "rapides et faciles à faire".