Rendre Paris "plus respirable" et "plus abordable" à l'horizon 2035-2040: après quatre années de difficiles négociations, le Conseil de Paris a définitivement adopté mercredi son plan local d'urbanisme qui dessine l'avenir de la capitale la plus dense d'Europe.
"L'enjeu, c'est de permettre à Paris de rester cette ville où on a envie de vivre dans les prochaines années", a plaidé la maire socialiste Anne Hidalgo, chaudement applaudie par sa majorité à l'issue du vote.
Vivement contesté par la droite parisienne, le PLU "bioclimatique" est "l'outil politique le plus puissant que nous ayons pour aménager et transformer la ville", a salué Lamia El-Aaraje, adjointe à l'urbanisme à la maire.
Capitale la plus dense d'Europe, Paris se vide de ses habitants depuis une dizaine d'années. C'est aussi la capitale européenne où le risque de mortalité face aux vagues de chaleur est le plus fort, selon une étude du Lancet Planet Health publiée en 2023.
Le PLUb, traduction réglementaire du plan climat 2024-2030 de la ville (également adopté mercredi), est l'aboutissement de quatre années d'âpres négociations au sein de la majorité d'Anne Hidalgo et de son ex-adjoint à l'urbanisme Emmanuel Grégoire, devenu député et désormais candidat déclaré aux municipales de 2026.
Dans l'accord finalement conclu en 2023, les écologistes ont obtenu notamment la limitation des tours de grande hauteur.
Végétalisation, éco-construction, réhabilitation de l'existant: ce PLU, qui remplace celui de 2006, "pense le bâtiment de demain pour qu'il participe à l'effort de respiration et de rafraîchissement" de Paris, a expliqué Lamia El-Aaraje.
"Demain, a-t-elle alerté, il y fera le même climat qu'à Séville, il fera trop chaud sous les toits en zinc", qu'il faudra végétaliser, "n'en déplaise aux défenseurs du patrimoine".
Mesure phare: la création de 300 nouveaux hectares d'espaces verts ouverts au public, pour atteindre les 10 mètres carrés d'espaces verts par habitant recommandés par l'Organisation mondiale de la santé, au lieu des 8,6 m2 actuels. "Ca ne va pas être facile", au vu du peu de foncier disponible à Paris, a concédé l'écologiste Corine Faugeron.
- Moins de bureaux, plus de logements -
"Qui peut trouver l'équivalent de 420 terrains de football dans Paris ?", a taclé David Alphand, co-président du groupe Changer Paris avec Rachida Dati, fustigeant un objectif "irréaliste".
Les élus de l'opposition s'en sont tous pris à la "bétonisation" de la ville, avec "3 millions de m2 construits" depuis une vingtaine d'années et la construction de la Tour triangle - "15.000 tonnes de béton" - comme l'a dénoncé Agnès Evren, sénatrice LR de Paris.
"Le procès en bétonisation que vous faites, c'est celui du logement", a rétorqué Emmanuel Grégoire, faisant valoir que sur les 3 millions de m2 construits, 2,5 millions avaient été consacrés au logement et à des services publics (bibliothèques, équipements sportifs...).
Plus de logements "abordables" et moins de bureaux: pour "préserver la mixité sociale", la municipalité vise "40% de logement public (social et intermédiaire, NDLR) à l'horizon 2035", a expliqué le sénateur Ian Brossat, coprésident du groupe communiste au Conseil de Paris.
La mairie crée des zones de "grand déficit en logement social", quand elles sont en-dessous du seuil de 10%, pour corriger le déséquilibre entre l'ouest et l'est de la capitale. Dès qu'un promoteur y construira 500 m2, il devra en réserver la moitié à de l'habitat social.
Environ 800 adresses ont été réservées via un dispositif appelé pastillage: un permis de construire déposé sur un bâtiment ne sera validé que s'il est transformé en un immeuble de logement social.
Les élus de droite craignent une "pression" sur les propriétaires d'immeubles qui les dissuaderait de rénover leurs biens.
Ils pointent aussi un "déséquilibre" entre logements privés et logements sociaux, au détriment des logements intermédiaires, ce qui "pousse à l'exil" des familles des classes moyennes, selon Geoffroy Boulard (LR), l'un des leaders du premier groupe d'opposition, Union capitale.
Le groupe de Rachida Dati réclame pour sa part la création d'une "zone de déficit en logements privés" et la création de "quartiers patrimoniaux".
Pour montrer ce que le PLU permettra de faire dans les prochaines années, la mairie va lancer un concours d'architecture sur des projets innovants, notamment sur la végétalisation des toits, ou la création "d'espace communs partagés" comme les cuisines.