Notre-Dame-des-Landes, une victoire pour le ministre Hulot

Pour Nicolas Hulot, ministre de l'Ecologie écouté mais parfois aussi bousculé, l'abandon du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes annoncé mercredi est une victoire politique majeure.

Figure de proue de la lutte environnementale, il était opposé de longue date à ce "projet du XXe siècle", "ruineux, inhumain et inutile". Et beaucoup avaient fait du sort du dossier, paralysé depuis 50 ans, un marqueur de son influence réelle au sein du gouvernement, à même de le pousser à claquer la porte.

Au fil des années, Nicolas Hulot s'est rendu sur place plusieurs fois -- accueilli d'ailleurs en 2011 par un fameux jet d'épluchures de carottes venu d'un opposant énervé, en pleine campagne de primaires écologistes pour la présidentielle.

Notre-Dame-des-Landes, promesse de nouveaux sols bétonnés, est "un cas d'école de ce à quoi il va falloir renoncer", estimait-il dans un livre publié avant d'être ministre. Il questionnait aussi "la légitimité" du référendum de 2016 en faveur du nouvel aéroport, qui n'avait pas abordé les autres options.

- 'Pas de deal' -

A-t-il pour autant posé le dossier sur la table avant d'accepter d'entrer au gouvernement en mai 2017 ? Début 2016, il avait décliné l'offre de ministère faite par François Hollande faute d'assurances sur un abandon du projet.

L'intéressé assure qu'"il n'y a jamais eu de deal": "J'ai dit à Edouard Philippe et Emmanuel Macron quelles étaient mes convictions profondes. Mon opposition à ce nouvel aéroport était donc connue de tous".

Nicolas Hulot "n'a pas fait de chantage sur ce sujet, ni à son entrée au gouvernement, ni ces derniers jours", dit le député LREM Matthieu Orphelin, un proche.

Agiter une menace de démission, "ce n'est pas ma conception de la démocratie", avait récemment assuré le populaire ministre. "Je ne veux rien obtenir par le chantage. Ce ne serait pas sain, ni durable".

Le candidat Macron s'était, dès février 2017, prononcé pour une médiation, se montrant plus ouvert qu'auparavant à une modernisation de l'actuel aéroport nantais. Reste que cette décision est "évidemment une victoire pour" Nicolas Hulot, estime Pascal Canfin, directeur du WWF.

"Sa présence a été un élément clé pour amener le gouvernement sur cette position," juge-t-il. "Sa présence augmente le niveau d'exigence et d'ambition sur les sujets environnement, car il a le poids politique suffisant, même si ça ne veut pas dire qu'il gagne tout le temps".

L'écologiste, écouté de tous les présidents depuis Jacques Chirac, répète qu'il aime être "le brise-glace". "Convaincre les acteurs de tous bords, aller repérer ceux qui sont le plus éloignés", écrit-il dans "Plus haut que mes rêves" (2013).

Les pro-NDDL n'ont pas manqué de l'accuser d'ingérence pendant les six mois de médiation, du fait notamment de la présence d'un proche parmi les médiateurs. Nicolas Hulot s'en est vigoureusement défendu, louant la vocation de cette mission "d'étudier en toute indépendance" les alternatives avant une décision "impartiale".

- Utile -

Depuis la publication mi-décembre du rapport jugeant "raisonnablement envisageables" les deux options (NNDL ou extension de Nantes-Atlantique), il est revenu dans le jeu, discrètement, aux côtés d'autres ministres, recevant les élus avec Edouard Philippe chargé de conduire le dossier.

La députée PS et ex-ministre de l'Ecologie Delphine Batho a dit "+merci Nicolas+", estimant qu'il "a certainement oeuvré à la décision".

Cette victoire consolera peut-être Nicolas Hulot de précédentes déconvenues au gouvernement. En octobre il avait fallu un dîner avec Emmanuel Macron pour rassurer cet "inquiet" - comme le qualifie le président.

Au chapitre de ses déceptions, le premier bilan des Etats généraux de l'alimentation, dont il bouda la clôture. Ou la mise en oeuvre de l'accord de libre-échange UE-Canada (Ceta).

Mais parmi ses victoires, la décision de la France, contre Bruxelles, de limiter à trois ans la réautorisation du glyphosate, ou d'interdire la recherche d'hydrocarbures.

Et des sujets de plus grande ampleur que NDDL l'attendent encore: feuille de route énergétique et nucléaire, réforme fiscale... ainsi que l'avenir de projets d'infrastructures, en "pause" pour raisons financières.

Face à cet agenda, il se donnait en octobre "un an" pour mesurer son utilité.

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