Au lendemain de l'abandon du projet d'aéroport, une nouvelle phase délicate s'ouvre à Notre-Dame-des-Landes: l'avenir de la ZAD, dont les occupants se disent prêts à rouvrir les accès mais refusent toute expulsion.
Première urgence: la libération des routes traversant la zone de Notre-Dame-des-Landes, signe d'un début de retour à la normalisation de la ZAD et à l'État de droit.
Le Premier ministre Édouard Philippe a sommé mercredi les opposants de rendre les routes bloquées "à la libre circulation de tous", faute de quoi les forces de l'ordre "procéderont aux opérations nécessaires". Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, a demandé jeudi matin que ce soit fait "d'ici la fin de la semaine prochaine".
Le mouvement anti-aéroport dans son ensemble s'est engagé mercredi "à y répondre lui-même", mais avec du temps et pas sous la contrainte policière. En périphérie de la ZAD, les forces de l'ordre restaient discrètes jeudi matin, effectuant des contrôles routiers à des points clés afin d'éviter notamment l'introduction sur le site de matières dangereuses.
Sur les trois routes traversant la zone, une pose problème: la D281, dite aussi "route des chicanes", obstruée depuis cinq ans de divers obstacles (pneus, épaves de véhicules, barricades en tous genres) et "gardée" quasiment en permanence depuis des cabanes et miradors. Sa libération fait débat depuis de longs mois au sein du mouvement anti-aéroport.
"Il n'y a pas de position unanime sur la ZAD à ce sujet", expliquait mercredi Marcel Thébault, agriculteur installé à Notre-Dame-des-Landes depuis 1999.
Pour Jean-Paul Naud, maire (sans étiquette) de Notre-Dame-des-Landes, l'idéal est de pouvoir "la rouvrir sans l'intervention des forces de l'ordre".
- Le devenir des terres -
Les discussions s'annoncent plus longues sur le devenir des terres de la zone, notamment sur les "5/600 hectares" selon le maire (sur 1.650), où les zadistes ont lancé des projets agricoles.
Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Travert, a proposé jeudi sur Sud Radio d'assigner ces terres à la production de produits bio ou sous signes de qualité pour alimenter la restauration collective régionale.
Les occupants de la ZAD se disent "prêts à négocier" avec l'État sur le futur projet de territoire agricole, mais ont répondu à l'ultimatum d'Édouard Philippe, qui a donné jusqu'au 30 mars pour évacuer les lieux, par un "refus de toute expulsion".
"On va se battre pour que tout le monde puisse rester ici et on va continuer à construire nos vies ici", affirme une occupante de longue date de la ZAD tandis que d'autres zadistes annonçaient dès mercredi soir leur départ "vers d'autres luttes", avant le printemps.
"Un beau projet se dessine pour la ZAD (...) Pour nous, le Larzac, où l'État restant propriétaire a cédé des sortes de baux à long terme à une société civile qui gère le foncier, est un exemple à suivre. Ce qui nous importe n'est pas la propriété des terres mais leur usage", a souligné à Paris lors d'une conférence de presse des associations Cécile Muret, secrétaire nationale de la Confédération Paysanne, fer de lance de la contestation anti-aéroport.
Les négociations ont déjà commencé, en se basant sur un document en six points signé par 22 organisations qui appellent à un rassemblement "le 10 février" dans le bocage.
"Six installations se sont faites récemment sur la zone et l'enjeu est de (...) répondre à tous les néo-ruraux qui ont des projets pour la faire vivre", a souligné Raphaël Bellanger, du FADEAR (réseau d'accompagnement et de formation).
Enfin, après l'abandon du projet, les discussions ont commencé avec le groupe Vinci qui devait construire l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Le PDG du groupe, Xavier Huillard, devait être reçu jeudi en fin de journée par le ministre des Finances, Bruno Le Maire, et la ministre des Transports, Élisabeth Borne.
Mme Borne doit "regarder avec lui comment nous pouvons réduire le coût de cette opération pour le contribuable", a précisé M. Le Maire, "L'objectif étant évidemment que le coût soit le plus réduit possible".
bur-asl/mcl/gvy/nm