Municipales à Bordeaux: Philippe Poutou, désormais chômeur, toujours candidat

Figure de proue du combat - perdu - contre la fermeture de l'usine Ford de Blanquefort (Gironde), Philippe Poutou est désormais chômeur mais toujours candidat: après deux présidentielles pour le NPA, le militant d'extrême gauche s'attaque à la mairie de Bordeaux.

"Quelqu'un de connu, ça peut aider à rendre visible une liste, rendre visible un combat", assure le candidat de la liste "anticapitaliste" de Bordeaux en Luttes, qui veut "faire entendre la colère sociale".

"On va voir que Bordeaux n'est pas qu'une ville de riches, qu'il existe des quartiers populaires qui osent s'exprimer pour la première fois", assure le militant.

De fait, le scrutin, dominé depuis 1947 par les figures emblématiques de Jacques Chaban-Delmas et Alain Juppé, promet cette fois d'être disputé.

Légère barbe et cheveu grisonnants, lunettes sur le front, perpétuel blue jeans, l'ex-ouvrier et délégué CGT aura 53 ans le 14 mars, à la veille du premier tour des municipales.

Né en Seine-Saint-Denis, au hasard des premières affectations d'un père postier, il a "vécu toute sa vie adulte à Bordeaux", dit-il avec son accent chantant du sud-ouest.

Il y est d'ailleurs, selon un récent sondage, encore plus connu que le maire Nicolas Florian (LR) mais "ça va. Je ne suis pas Gérard Depardieu. Je peux sortir dans la rue relativement tranquillement", s'amuse-t-il.

Excepté une campagne municipale en 2014 sous les seules couleurs du Nouveau Parti Anticapitaliste (2,5% des voix), c'est surtout aux deux présidentielles de 2012 et 2017 (1,15% et 1,09% des voix) qu'il doit sa notoriété.

- La lecture pour "bol d'air" -

Avec en point d'orgue un débat d'avril 2017 au cours duquel il a fustigé les "politiciens corrompus", devant François Fillon et Marine Le Pen, alors empêtrés dans les affaires.

"Trois ans après, on m'en parle encore", dit-il, pourtant, "je ne faisais pas le malin ce jour-là. J'étais plutôt impressionné. Mais ce qui a marqué les gens, c'est que j'ai parlé devant les personnes concernées", analyse-t-il.

Dans la région, l'homme, volubile, souriant, est de tous les combats : Blanquefort bien sûr, réforme des retraites, prisonniers basques, décrocheurs de portraits Macron, Kurdes, climat...

C'est à ces occasions qu'une alliance s'est formée pour cette campagne, entre le NPA, La France Insoumise alliée à un collectif citoyen et des "gilets jaunes".

L'homme concède que tout militant a "des coups de mous. On n'est pas des curés. Mais quand on est révolté, on est enthousiaste", ajoute M. Poutou dont la compagne, enseignante, est également militante.

Son "bol d'air", c'est la lecture : "Je suis un grand lecteur, de romans notamment", dit l'homme qui vient de lire "quasiment tout" Eric Vuillard.

Et puis "j'adore le foot. Quand j'étais gamin, j'allais à Lescure (aujourd'hui stade Chaban-Delmas) avec mon père. J'étais dingue de l'ambiance".

Mais la construction du nouveau stade inauguré en 2015, en lieu de "priorités sociales", l'a "écoeuré. Du coup, je boycotte. Je ne suis pas allé voir les Girondins depuis quatre ans".

Officiellement licencié de Ford à la fin du mois, il compte "faire une formation. Ca reporte de six mois l'appréhension du vide".

Pour l'heure, il affronte entre autres le maire sortant, l'écologiste allié à la gauche Pierre Hurmic et le marcheur Thomas Cazenave.

"Dès l'annonce de la campagne, on a eu énormement de sympathie", assure M. Poutou et depuis, "on est la surprise et la crédibilité".

Trois sondages sur quatre lui donnent en effet plus de 10%, de quoi se maintenir au second tour, ce qu'il fera, dit-il, en dénonçant la "cogestion" locale gauche-droite.

"On ne prend pas (des voix) à Hurmic. On prend dans une population qui ne votait plus", ajoute-t-il.

Sur le marché du quartier populaire du Grand Parc où il distribue ses tracts réclamant plus de services publics, les transports gratuits ou l'écologie sociale, même les militants des listes concurrentes viennent lui serrer la main.

"Même pour les gens de droite, je suis vu comme quelqu'un globalement de sympa", s'amuse-t-il, "certains viennent me dire +je ne suis pas de votre bord, mais vous êtes courageux+".

ff/pjl/or

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