"On ne peut pas tirer un trait comme ça sur l'avenir de nos vallées": confortée par une fréquentation "exceptionnelle" à Noël, la station de l'Alpe du Grand Serre, menacée de fermeture, veut croire en son avenir, même si les élus locaux avertissent que "rien n'est joué".
Il a beau pleuvoir et venter sur le front de neige où ne s'aventurent que de rares et courageux skieurs en ce jeudi matin, les habitants du village de La Morte, en Isère, sont heureux d'accueillir la ministre déléguée chargée de la Ruralité Françoise Gatel, y voyant un signe d'intérêt et d'espoir pour leur station de ski.
La ministre, venue "écouter" les acteurs du territoire, n'a certes pas fait d'annonce ni "laissé de "cadeaux sous le sapin" à l'issue de ses entretiens avec les élus et représentants de l'industrie du ski. Mais le seul fait qu'elle se soit déplacée montre que l'Alpe du Grand Serre, station familiale de moyenne montagne proche de Grenoble, est "un projet pilote", souligne Yohann Echardour, co-fondateur du collectif citoyen La Morte vivante, créé ces derniers mois pour sauver la station.
"On est la plus grande des petites stations, la plus petite des grandes stations. C'est peut-être un peu prétentieux ce que je vais dire, mais l'avenir des villages de moyenne montagne et des stations de montagne est en train de se jouer à l'Alpe du Grand Serre. Tout le monde regarde ce qui va se passer ici", lance-t-il depuis le confortable "camp de base", un tiers-lieu bricolé en quelques semaines par l'association pour avoir "un endroit où discuter entre citoyens".
L'avenir semblait pourtant plutôt sombre en octobre lorsque la Communauté de communes de la Matheysine (CCM), dont dépend la station, avait décidé de ne plus la subventionner, ce qui aurait dû entraîner sa fermeture dans la foulée, impactant quelque 200 emplois directs et indirects.
La station, située à 1.370 mètres d'altitude, a finalement pu bénéficier d'un sursis d'un an après une forte mobilisation et la levée de près de 400.000 euros auprès de différents donateurs.
- "Signe du ciel" -
L'Alpe du Grand Serre, avec ses trois télésièges et ses 50 km de pistes, reste donc ouverte aux skieurs et a bénéficié d'une fréquentation "historique" pendant les vacances de Noël, 30% supérieure à sa meilleure année, souligne M. Echardour.
Un "signe du ciel, il y a eu la neige, il y a eu le soleil !", abonde Lionel Vincent, propriétaire d'un magasin de location de skis dans la station, se déclarant "remotivé".
"Vu ce qui s'est passé à Noël dans toutes les stations de France, les petites stations et les grandes, et la fréquentation qu'il y a eu, on ne peut pas tirer un trait comme ça sur l'avenir de nos vallées", lance-t-il dans son commerce au pied des pistes où s'empilent skis, bâtons, chaussures et casques de toutes les marques et toutes les couleurs.
La présidente de la CCM, Coraline Saurat, s'est montrée pour sa part plus mesurée à l'issue des entretiens avec la ministre, avertissant qu'à ce stade "rien n'est joué" pour l'avenir de la station.
"Tous les scénarios" restent à l'étude, c'est-à-dire "soit l'arrêt, soit le maintien", a souligné l'élue, réclamant le "soutien de tous" pour "aboutir à un projet viable, un projet 4 saisons" permettant de venir à bout des lourdes charges de fonctionnement et de la "vétusté" de certaines des infrastructures de la station.
La décision de continuer de soutenir financièrement la station reviendra de nouveau à la Communauté de communes avec un vote d'ici juin. "Il faudra qu'on ait quelque chose de solide à aller leur présenter", a-t-elle souligné.
Mme Gatel a de son côté salué "l'envie d'avenir" du territoire, mais noté que "ce n'est pas l'Etat qui d'un claquement de doigts va dire +voilà ce que vous devez faire+". "Il faudra voir comment l'Etat accompagne", mais "je ne fais jamais de promesses que je peux pas tenir", a-t-elle averti.