"Maltraitance" managériale: le gouvernement met fin aux fonctions du DG de l'ONF

Le gouvernement a "mis fin aux fonctions" du directeur général de l'Office national des forêts (ONF), Bertrand Munch, cinq mois après le lancement d'une commission d'enquête chargée d'évaluer les méthodes de management au sein de l'ONF.

"Il est mis fin aux fonctions de directeur général de l'Office national des forêts exercées par M. Bertrand Munch", indique un décret publié jeudi au Journal officiel, sans plus de précisions.

L'ONF emploie environ 8.400 personnes, dont un peu plus de la moitié sont des fonctionnaires ou des contractuels de droit public. Il gère les 11 millions d'hectares de forêts publiques françaises.

C'est un mail du médecin de prévention de l'ONF, daté de mai 2021 et consulté par l'AFP, qui a donné l'alerte. Ce dernier mentionnait des "témoignages répétés et concordants de la part de plusieurs membres de l'encadrement supérieur, faisant état d'un profond mal-être lié au comportement personnel du directeur général", en poste depuis le 6 janvier 2020.

Un comportement se traduisant, selon ces mêmes témoignages, par des faits "de maltraitance sourde et insidieuse, d'humiliation publique, mais aussi d'inattention ou d'incapacité de compréhension quant au fond des sujets professionnels."

"Les témoignages de ces personnes concernaient, directement et exclusivement, le comportement jugé toxique du directeur général", est-il également affirmé dans ce document.

Interrogé par l'AFP, le ministère de l'Agriculture a justifié ce changement de direction par une "nouvelle étape pour l'ONF", nécessitant de "faire appel à un haut manager-expert dans les champs de compétences de l'établissement", tout en se félicitant des actions de l'ancien directeur qui "a su rétablir l'activité de l'établissement au bout de quelques semaines" en dépit de la pandémie.

Le ministère avait pourtant diligenté en novembre 2021 une Commission d'enquête chargée d'évaluer les méthodes de management en vigueur au siège de l'ONF à Paris, a appris l'AFP de sources concordantes.

Un rapport a été remis au ministre mais n'a pas donné lieu à une communication, a fait savoir à l'AFP Philippe Canal, secrétaire général adjoint du Snupfen Solidaires, syndicat majoritaire de l'ONF, confirmant le lien entre les accusations de maltraitance managériale portées à l'encontre de Bertrand Munch et son renvoi.

- La philosophie de Bertrand Munch -

Mais selon Philippe Canal, "des problèmes étaient apparus avant même sa nomination".

"La commission parlementaire chargée de donner son avis sur la direction de l'ONF avait émis de grandes réserves sur Monsieur Munch. Puis ces réserves se sont confirmées, que ce soit en interne ou en externe", a-t-il poursuivi.

La nomination de M. Munch, initialement proposée par l'Elysée et validée par le Parlement en décembre 2019, était intervenue dans un climat social et financier dégradé depuis de longues années pour l'ONF, déficitaire.

Un nouveau contrat d'objectifs et de performances (COP) pour 2021-2025 - avec pour but le retour à l'équilibre financier - avait été proposé par l'État en juin dernier, prévoyant le départ de près de 500 agents dans les cinq ans.

Parmi les relations tendues que M. Munch entretenaient avec des acteurs du secteur, celle avec la Fédération nationale des chasseurs (FNC) est rapportée dans une note consultée par l'AFP. Celle-ci mentionne que "la philosophie" de Bertrand Munch avait "surpris" les membres de la FNC.

En cause, entre autres, le souhait de ce dernier de supprimer l'agrainage, technique qui permet de fixer les populations de sangliers sur un site défini pour les éloigner des cultures agricole, "sur l'entièreté des territoires de l'ONF" mais aussi de "reprendre le maximum de lots possibles (de forêts, NDLR) pour gérer eux-mêmes la chasse".

"Le souhait de la FNC est de changer de directeur de l'ONF", écrivait la fédération dans ce document.

"Une convention entre l'ONF et la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) devait également être négociée", selon M. Canal.

"Nous sommes en 2022, cette convention n'est toujours pas signée", a-t-il ajouté. Une information confirmée par la FNCOFOR, qui s'est dite inquiète pour ce projet alors qu'un rendez-vous était fixé début avril pour la poursuite des discussions.

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