La forte hausse des cours de la pâte à papier l'an dernier a pesé sur le secteur papetier, également perturbé par la décision de la Chine de restreindre drastiquement ses importations de papiers et cartons à recycler.
La Chine a une influence majeure sur le marché mondial de la pâte à papier, et sa demande toujours soutenue en 2018 a entraîné une flambée des cours. Le marché chinois représente la première zone de consommation de pâte à papier, rappelle la fédération française de l'industrie papetière, Copacel, dans son récent bilan annuel.
Les cours ont augmenté d'environ 30% en 2018 pour la pâte de fibre longue (NTSK).
L'année 2019 apparaît comme "une année de transition", estime Philippe Gaudron, vice-président de Copacel lors de la présentation du bilan de la fédération. "Les prix de la pâte se sont érodés, mais restent à niveau élevé", a-t-il souligné.
La hausse des prix de la matière première était la raison majeure avancée par le groupe Sequana lors de l'annonce début janvier d'une demande de redressement judiciaire pour des usines de fabrication de papier de sa filiale Arjowiggins.
Faute de repreneur, l'usine de Bessé-sur-Braye (Sarthe) qui emploie près de 600 personnes, a été placée vendredi en liquidation judiciaire.
"Malgré les augmentations significatives de ses prix de vente, mais insuffisantes dans un marché surcapacitaire, le groupe n'a pas pu compenser la hausse de ses coûts variables", avait expliqué Sequana. La hausse du coût de l'énergie a aussi pesé.
La maison mère d'Arjowiggins avait rappelé que les papiers d'impression et d'écriture sont en "baisse structurelle".
La révolution numérique est en grande partie à l'origine de ce déclin régulier de la consommation de papier, qui concerne tous les pays développés. La France est importatrice nette de pâte à papier.
- L'enjeu du papier à recycler -
En parallèle, la hausse de la consommation de papier en Chine est portée par l'augmentation du niveau de vie avec une utilisation en hausse des produits d'hygiène et par le dynamisme du secteur emballage, tiré par les exportations, selon la fédération Copacel.
La décision chinoise de réduire ses importations de matières recyclées a aussi eu pour effet d'amener des fabricants d'emballage à employer de la pâte vierge, contribuant ainsi à la hausse de la demande et donc des cours, analyse t-elle.
La Chine utilise pour deux tiers de fibres recyclées dans sa production de papiers d'emballage, selon le dernier rapport du cabinet Cyclope.
La mesure chinoise de réduction des importations de déchets a eu une double conséquence, a expliqué à l'AFP le directeur économie circulaire de Copacel, Jan Le Moux.
D'une part, "les prix ont beaucoup baissé" pour les papiers et cartons à recycler (PCR) et "sont revenus à un niveau supportable, après avoir beaucoup augmenté pendant plusieurs années depuis 2015", a-t-il dit.
Mais en contrepartie, "la répercussion sur la qualité a été très négative" car ces déchets mal triés ont été intégrés dans la filière en Europe, ajoute t-il.
La volonté de la Chine de réguler ce qu'elle importe comme déchets à recycler "va perdurer", juge le spécialiste, qui se dit "inquiet du défaut de qualité", qui est lié aussi à des problèmes de tri en France.
"Ce que la Chine a refusé, ce sont des tonnages en mélange" qui sont seulement un appoint de 12% du total de la matière première pour les fabricants français de papier pour carton ondulé. "90% doit être bien trié parce qu'on ne fait pas un bon carton si on n'a pas à la base une bonne matière", souligne M. Le Moux.
La décision chinoise "nous rappelle qu'il faut investir dans des bons outils de tri", résume-t-il.
A ce sujet, s'ajoute la prochaine loi sur l'économie circulaire qui place les entreprises "dans l'expectative", note Jan Le Moux.
La fédération demande notamment que la future loi n'interdise pas les imprimés publicitaires, dans le contexte de "fragilité" de la filière papetière graphique. "L'imprimé publicitaire finance un petit peu la survie du reste des usages", note M. Le Moux.
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