Les ingénieurs et techniciens du Bureau de recherche géologique et minière (BRGM), chargés notamment de la surveillance des nappes phréatiques, ont dénoncé vendredi la "sécheresse salariale" qui les affecte et risque d'entraîner une fuite des compétences de cet établissement stratégique dans la transition énergétique.
Plusieurs dizaines de salariés ont fait le déplacement d'Orléans pour manifester vendredi matin à Paris, en marge d'un conseil d'administration, derrière une banderole "Bon à Rien Gagner par Mois", détournement malicieux du sigle de leur établissement.
L'intersyndicale a relayé auprès du conseil d'administration le "sentiment d'injustice et d'incompréhension" des salariés, dont les rémunérations sont inférieures de 25% à celles du privé et de 15% à celles pratiquées dans les autres Epic (Établissement public à caractère industriel et commercial en France) de recherche comparables.
"Beaucoup de collègues aiment leur travail, mais quand ils se voient proposer 25% de plus dans une autre entreprise qui peut être d'ailleurs passionnante, ils risquent de ne pas rester, on a déjà eu beaucoup de départs", s'est inquiété Olivier Frezot, secrétaire du CSE.
Outre la surveillance des effets du changement climatique sur la ressource en eau, le BRGM, qui emploie un millier de personnes, est chargé de missions cruciales pour tenter de contenir ce réchauffement.
Il doit notamment effectuer un grand recensement sur le territoire des gisements en métaux stratégiques dans cette transition, comme le cuivre ou le lithium.
Si les salaires d'embauche s'élèvent à quelque 37.000 euros bruts par an pour un ingénieur débutant, les écarts avec les autres Epic et le privé se creusent avec les années, selon Olivier Frezot.
"Dès qu'ils ont 10 ans d'expertise, là, l'écart est criant: c'est là qu'ils sont les plus utiles à la collectivité et c'est là qu'ils demandent à partir", a-t-il indiqué.
L'intersyndicale a été conviée à une réunion sur le sujet mercredi soir prochain au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Contacté par l'AFP, l'entourage de la ministre Sylvie Retailleau a indiqué que l'augmentation de la masse salariale au titre de 2023 pourrait être revue à la hausse, passant de 4,1 à 5%.
L'augmentation de 4,1%, qui couvre également les mesures individuelles et d'avancement, s'est traduite par 1,3% d'augmentation générale des salaires, selon Anne Bourguignon, déléguée syndicale CFDT, qui déplore que cela ne couvre même pas l'inflation. En outre, ce supplément de 0,9 point serait selon elle pris sur le budget du BRGM, l'Etat ne prévoyant pas de dotation supplémentaire.
"Le budget du gouvernement est un budget serré", a indiqué l'entourage de la ministre, qui reconnaît à demi-mot un problème, mais souligne "des marges budgétaires assez réduites pour le régler".
"Les agents attendent une revalorisation, à la hauteur ne serait-ce que de l'inflation, avec en outre des études montrant un décalage très fort par rapport à d'autres établissements et par rapport au marché du travail, et ce depuis 20 ans", a déclaré dans un entretien récent au média News tank, la nouvelle présidente du BRGM, Catherine Lagneau, nommée au 1er septembre.
L'intersyndicale a dénoncé un "blocus" de Bercy sur ce dossier: contacté par l'AFP, le ministère de l'Economie et des Finances, qui ne sera pas représenté mercredi, n'a pas souhaité faire de commentaires.