Les chasseurs sortent du bois pour changer leur image

"On n'est pas que des vieux alcooliques avinés": après avoir longtemps fait fi de leur image, les chasseurs montent au créneau pour la corriger, expliquer leur pratique et séduire de nouveaux adeptes, dans un contexte défavorable.

Une jeune fille, allure citadine, lance à son amie: "Généralement le week-end je vais dans un bois, une clairière, et puis je fais ma petite affaire! Tu ne peux pas imaginer le plaisir que ça me procure..." Avant de la rassurer: "Oh ça va Marie! Ce que je suis en train de te dire c'est simplement que j'aime... la chasse à l'arc!"

Voici un extrait d'un des spots de la nouvelle campagne de pub numérique lancée la dernière semaine d'août par la Fédération nationale des chasseurs (FNC) afin de "dépasser les stéréotypes" et "faire mentir le fameux sketch des Inconnus sur la galinette cendrée!"

Son président Willy Schraen explique à l'AFP: "Cette campagne n'est pas faite pour les chasseurs, on parle à des gens qui ne sont pas du tout du monde de la chasse", soit les citadins, les jeunes et les femmes.

Le but est de les attirer alors que le nombre de pratiquants (1,03 million en 2019 selon les chiffres de la FNC) a été divisé par deux en quarante ans. De plus, 40% sont des retraités, seulement 15% ont moins de 35 ans et 2,5% sont des femmes. Dans un contexte général où l'écologie et la lutte contre la maltraitance animale apparaissent comme des préoccupations croissantes dans l'opinion publique.

Ce ne sont pas celles des chasseurs, selon leurs opposants, dont Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la protection des oiseaux qui voit une "opération de réhabilitation" dans l'offensive de la FNC, dont la campagne de pub "Les chasseurs, premiers écologistes de France", il y a deux ans, avait marqué les esprits.

Comme elle gomme, dans sa communication visuelle, quasiment toute arme ou image de gibier traqué ou décédé, pour mettre en avant animaux sauvages et paysages, la fédération efface, selon Allain Bougrain-Dubourg, "les mots qui illustrent une réalité des plus tragiques pour les remplacer par des mots pudiques: on ne tue plus mais on prélève, on régule."

- "Ça ne trompe personne" -

"(Les chasseurs) n'emploient plus de mots qui sentent le sang mais ça ne trompe personne" ajoute-t-il.

Willy Schraen parle de "caricature": "Les gens ne comprennent pas bien ce qu'est la chasse, donc rejettent. Quand on regarde dans le fond les actions des chasseurs sur les territoires, on se rend compte que ce sont les gens qui font le plus d'écologie, qui produisent le plus de biodiversité."

"On plante, on nettoie, on coupe, on restaure, et ça les gens ne savent pas du tout" détaille-t-il.

Élu en août 2016 à la présidence de la FNC, il veut faire oeuvre de pédagogie pour "changer l'image des chasseurs", qui ont commis "une erreur fondamentale en "vivant cachés" pendant des années.

De seulement 50.000 euros à son arrivée, le budget communication de la fédération a donc atteint le million d'euros, et est amené à augmenter.

"Chasser les préjugés" sur les chasseurs, c'est aussi le but d'une campagne de pub lancée, en même temps que celle de la FNC et notamment dans le métro parisien, par une plateforme de vidéos de chasse à la demande.

Son égérie est jeune, présente bien, et s'appelle Johanna Clermont. Un pseudonyme choisi par cette influenceuse, payée par des marques de chasse pour faire leur promotion sur les réseaux sociaux.

Forte de 126.000 abonnés sur Instagram par exemple, elle y met également en scène sa passion de la chasse, ce qui lui a valu d'être propulsée dans les médias, y compris étrangers, comme le nouveau visage de cette chasse française new look.

A son corps défendant, selon elle: "Ce n'est pas quelque chose que je recherche particulièrement; je montre juste la réalité, ce que je suis. Après, j'incarne facilement ce mouvement, car dans l'imaginaire des gens je suis à l'opposé du stéréotype du chasseur."