Les "bassines" contestées du Marais poitevin en chiffres

Les projets de stockage d'eau pour l'irrigation agricole, lancés en Poitou-Charentes face à la menace de sécheresses récurrentes, engendrent de plus en plus de tensions autour de la préservation et du partage de la ressource.

Voici les principaux chiffres du débat :

. 1.573 piscines olympiques

C'est l'équivalent du volume d'eau - 5,9 millions de m3 - des 16 réserves prévues dans les Deux-Sèvres, projet élaboré par un groupement de 220 exploitations - ou 450 agriculteurs - avec le soutien de l'État.

Selon ses partisans, le système permettrait de "baisser de 70%" les prélèvements dans le milieu environnant. Mais ses opposants dénoncent un "accaparement" de l'eau, "bien commun", par l'agro-industrie.

. +5% à 6% de débit

C'est le gain envisageable sur les cours d'eau l'été, selon une modélisation du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), commandée par les porteurs du projet et dont les opposants critiquent la méthodologie, qui ne prend pas en compte les effets du changement climatique.

Pour l'hydrogéologue Alain Dupuy, spécialiste de la région et membre du comité de suivi scientifique du projet, dans ce territoire très spécifique "où nappes et rivières sont interconnectées", "prendre l'eau en abondance l'hiver et interdire tout prélèvement dans le milieu l'été devrait bénéficier aux zones humides".

Mais pour préserver au mieux la ressource, il faudra également "changer de pratiques culturales, replanter des haies, des bandes enherbées et refaire des méandres de cours d'eau".

. 3 à 4% d'évaporation ou... plus

La part d'eau perdue par évaporation dans ces réserves est de 3 à 4% selon les porteurs du projet, qui se basent sur le retour d'expérience d'ouvrages similaires dans la région.

Mais cette part peut être plus "conséquente" et l'eau "peut y subir des dégradations", estime l'hydroclimatologue Florence Habets, du CNRS.

. 30 centimes d'euros

C'est le prix du m3 d'eau utilisable pour les agriculteurs reliés aux réserves, qu'ils considèrent comme une "assurance-récolte" face au changement climatique.

Mais l'inflation a déjà fait grimper de 40% le coût des installations en un an et l'envolée du coût de l'énergie, nécessaire au pompage, pourrait perturber l'économie du projet, avertit Sébastien Loubier, chercheur à l'Inrae. Selon lui, "à partir de 30-35 centimes d'euros le m3" d'eau et sans soutien public, les productions en grandes cultures "ne sont plus rentables".

. 70 millions d'euros

C'est le coût total des 16 retenues, récemment réévalué à la hausse pour inclure notamment les frais de sécurisation des ouvrages. Il est financé à 70% par des fonds publics en échange de l'adoption de pratiques agroécologiques par les agriculteurs bénéficiaires.

Des associations environnementales ont retiré leur soutien au projet, faute d'avancées sur ce point à leurs yeux.

. 93 réserves

Au total, 93 réserves de substitution en projet dans l'ex-région Poitou-Charentes font l'objet de recours d'opposants, qui craignent un "bassinage" général du pays.

Pour Alain Dupuy, le modèle n'est pas duplicable partout, en particulier dans des zones "avec des nappes plus profondes, qui ne réagissent pas de la même manière".

En Charente-Maritime, la justice a interdit cet hiver de remplir cinq "bassines" construites en 2010, en raison de "l'insuffisance" des études d'impact, puis invalidé six autres pour des volumes jugés excessifs.

En Vendée voisine, 25 retenues construites depuis 2006 ont "permis de faire remonter significativement le niveau de la nappe" mais sans empêcher le dépassement fréquent des seuils d'alerte, notait en 2021 l'Agence de l'eau Loire-Bretagne.

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