Les autorités ont "édulcoré" un rapport à la demande de Nestlé Waters, selon l'enquête sénatoriale

Les autorités ont "édulcoré" un rapport à la demande de Nestlé Waters fin 2023 en acceptant de supprimer "certaines mentions de bactéries contaminant les eaux" de Vergèze, dont les sources sont utilisées pour Perrier, révèle un rapport parlementaire.

La commission d'enquête sénatoriale sur les pratiques des industriels de l'eau en bouteille et les responsabilités des pouvoirs publics dans le scandale des traitements illicites utilisés notamment par Nestlé Waters (Perrier, Hépar, Contrex) a rendu ses recommandations lundi.

Dans son rapport final rendu public en fin de matinée figurent de nouvelles révélations, la commission indiquant avoir été saisie à la fin de ses travaux par "un lanceur d'alerte sur un épisode qui illustre parfaitement les dysfonctionnements de l'action de l'État et les pratiques d'un industriel".

Après avoir constaté fin 2020 l'utilisation de traitements illégaux sur ses sites du Gard (Perrier) et des Vosges (Contrex, Hépar), Nestlé Water soumet au gouvernement un plan de transformation incluant le remplacement des traitements par une microfiltration controversée mais aussi la conversion de deux des puits de Vergèze pour produire de l'eau de boisson Maison Perrier, traitée et donc sans la mention eau minérale naturelle.

La production d'eaux aromatisées Maison Perrier est toutefois soumise à autorisation des autorités locales après avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) du Gard, présidé par le préfet mais aussi composé de membres d'associations de consommateurs.

L'autorité régionale de santé (ARS) est chargée dans ce cadre d'un rapport concernant notamment la "qualité de l'eau brute" et les "analyses microbiologiques" qui ne convient pas à l'industriel.

Selon le rapport parlementaire, Nestlé a demandé des modifications, d'abord à l'ARS puis au niveau de cabinets ministériels.

Des échanges entre les dirigeants de l'ARS évoquent des "engagements pris un peu à la va vite" par le préfet auprès de Nestlé Waters concernant ces modifications. "Nous proposons cette version en rouge, mais on ne peut pas aller au-delà", indique le directeur de l'ARS pour le Gard.

La version finale du rapport retire la liste des bactéries détectées mais aussi d'herbicides après que l'industriel a transmis "de nouveaux paragraphes à substituer". Des passages sur les bonnes pratiques de l'industriel ont été ajoutés.

"L'industriel a caviardé, est devenu censeur, et même co-auteur d'un rapport d'une autorité régionale de santé. Le fonctionnaire instructeur du rapport a refusé ce caviardage et retiré sa signature. Mais le document a quand même été modifié sous la dictée de Nestlé", s'indigne le rapporteur de la commission Alexandre Ouizille, appelant à une "inspection et sanction".

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