A l'ère du Covid, les entreprises contraintes d'innover pour garder leurs salariés

Jours de congés, tablettes ou cours de sport: la pandémie de Covid-19, qui a changé le rapport au travail de beaucoup de salariés, a poussé certaines entreprises à prendre des initiatives originales pour maintenir leur engagement.

Certes, "les entreprises n'ont pas attendu" la pandémie pour se soucier du bien-être des salariés, relève Benoît Serre.

Mais "un des acquis du Covid, c'est qu'il n'y a plus le choix: les salariés disent (à leur employeur) +soit vous bougez, soit nous on va bouger+", complète le vice-président de l'Association nationale des DRH.

Reste à inventer, pour chaque entreprise, la réponse la mieux adaptée aux préoccupations des employés.

Fabricant d'escaliers basé dans le Loiret, Oéba a choisi d'octroyer "une journée de congé d'anniversaire" par an à ses salariés.

A une autre échelle, l'éditeur de logiciels Adobe offre chaque mois un "global day off" (jour de congé mondial) à l'ensemble de ses effectifs, dont ses 500 salariés en France.

Le principe? "Tous les salariés Adobe dans le monde ne travaillent pas le même jour, c'est en général un vendredi", détaille Karine Voirin, DRH Europe de l'Ouest.

"Ca a un impact très fort sur l'engagement des équipes, très investies", assure-t-elle.

- Prévenir la "désaffection" -

Soumise à des contraintes légales en matière de temps de travail, la région Île-de-France a plutôt misé sur des tablettes numériques, distribuées à plus de 8.000 agents employés dans les lycées franciliens.

L'objectif était double: maintenir un accès "simplifié" à tous les acteurs de la région et réduire la "fracture numérique" par rapport aux agents employés au siège du Conseil régional, détaille Morgan Jacquemin, directeur adjoint du bien-être au travail.

Plus généralement, "les salariés conditionnent leur engagement à la façon dont ils ont été traités", constate Christophe Nguyen. "On le voit dans la désaffection de certains secteurs, comme l'hôtellerie-restauration, le médico-social, qui ont du mal à recruter parce que les gens ont été épuisés et ne voulaient plus de ça", souligne le cofondateur du cabinet Empreinte humaine, spécialisé dans le conseil en qualité de vie au travail (QVT).

En plus des aménagements dans l'organisation du travail, les initiatives en matière de santé des salariés ont été dopées par la pandémie.

A la Métropole européenne de Lille (3.000 agents), un kit sanitaire a ainsi été distribué aux personnels.

C'est "une sorte de petite trousse de toilette: du gel, un spray pour désinfecter les tables de réunion, une clé pour ouvrir les portes avec un objet en plastique plutôt qu'avec la main, un sac poubelle", énumère Doriane Huart, directrice générale adjointe du pôle RH.

Au laboratoire pharmaceutique Provepharm (120 salariés), ce sont des cours de sport en ligne qui ont émergé à l'occasion de la pandémie. Ils ont été pérennisés au format "présentiel" lors du retour sur site des équipes, et sont prêts à rebasculer en mode virtuel dans le contexte du télétravail renforcé qu'encourage le gouvernement.

- Du court terme? -

Revers de la médaille: toutes ces évolutions de l'univers du travail font peser un poids supplémentaire sur les épaules des managers.

"Il peut y avoir un paradoxe", reconnaît Karine Voirin. "On demande aux managers de continuer à gérer l'activité aussi bien que possible, tout en leur disant de veiller au bien-être et à la santé mentale de leurs équipes."

Une surcharge de travail que la DRH suggère de résoudre par "un échange ouvert et transparent", pour éviter de voir les managers "isolés".

Parfois se pose aussi la question de l'opinion des salariés par rapport à ces aménagements du travail, pour l'heure mesurée essentiellement via des baromètres internes aux entreprises concernées.

Un jour de congé pour l'anniversaire, "c'est un avantage social mais c'est du court terme", nuance Christophe Nguyen.

"C'est comme une prime, c'est du +one-shot+. Si on veut donner de la reconnaissance, c'est plus par la relation, l'échange, le +feedback+ que par des avantages", poursuit le spécialiste de la QVT.

La tendance au travail "aménagé" semble en tout cas partie pour se prolonger: mardi, Publicis a annoncé que dès 2022, tous ses collaborateurs pourraient travailler, à raison de six semaines par an, dans n'importe quel pays où le groupe est présent.

chl-dga/cel/pb

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