L'EPR, dont EDF prévoit de fournir plusieurs exemplaires pour un gigantesque projet nucléaire indien, est un réacteur de troisième génération conçu pour offrir une puissance et une sûreté améliorées, mais qui a subi de nombreuses déconvenues.
Lancée en 1992, cette technologie présentée comme le fleuron de la filière nucléaire française a été codéveloppée par le français Areva et l'allemand Siemens au sein de leur filiale commune, dont Siemens s'est depuis retiré.
EDF a finalement pris le contrôle de cette activité lors de la réorganisation de la filière nucléaire française orchestrée par l'État.
Conçu pour fonctionner pendant 60 ans, l'"European Pressurized Water Reactor" se fonde sur la technologie des réacteurs à eau sous pression, la plus utilisée dans le monde.
Il offre une puissance très élevée (1.650 mégawatts) et bénéficie d'une multiplication des systèmes de sauvegarde pour refroidir le coeur du réacteur en cas de défaillance, d'une coque de protection en béton et acier et d'un récupérateur de corium censé réduire les conséquences en cas d'accident grave.
- Retards en France et Finlande -
Le premier chantier a été lancé à Olkiluoto (Finlande) en 2005, pour le compte de l'électricien TVO, avec Areva et Siemens comme maîtres d'oeuvre. Mais les contretemps et dérapages budgétaires se sont accumulés.
Le chargement du combustible a enfin obtenu son feu vert fin mars et n'est prévu que l'an prochain, avec plus de dix ans de retard, pour une production d'électricité en février 2022.
Le deuxième EPR, en chantier depuis 2007 à Flamanville (Manche) en France, a également accumulé les déboires, à cause notamment d'anomalies découvertes sur la composition de l'acier du couvercle et du fond de la cuve.
L'Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) a exigé que le couvercle de la cuve soit remplacé avant la fin 2024.
EDF s'est aussi heurté à des problèmes de soudures et le groupe vise maintenant un chargement du combustible à fin 2022. Un planning que le président de l'ASN a qualifié de "très serré" mais "possible".
- En service en Chine, surcoûts en Angleterre -
Deux autres EPR ont été commandés par la Chine. Taishan 1 a été le premier au monde à fonctionner, bien que le chantier ait commencé en 2009, après celui de Flamanville. Le deuxième réacteur de Taishan est aussi entré en service commercial.
L'EPR a aussi été retenu pour un projet de deux réacteurs à Hinkley Point en Angleterre, qui a dernièrement été affecté par la pandémie de Covid-19.
Le début de production d'électricité par le premier réacteur est à présent prévu en juin 2026 au lieu de fin 2025 comme annoncé initialement.
Les coûts du projet ont aussi été rehaussés: entre 22 et 23 milliards de livres désormais, contre 21,5-22,5 milliards auparavant.
Il reste par ailleurs toujours un "risque" de retard de respectivement 15 et 9 mois sur les deux réacteurs, qui se traduirait par un nouveau surcoût.
Le gouvernement britannique a aussi engagé des discussions pour la construction d'une nouvelle centrale nucléaire, Sizewell C, dans le Suffolk sur la côté Est de l'Angleterre. Elle doit être une quasi réplique de Hinkley Point C.
Malgré tous ces déboires, EDF a bon espoir de vendre de nouveau l'EPR à l'étranger, tablant sur la volonté de certains pays d'améliorer leur bilan climatique et notamment de moins dépendre du charbon.
C'est d'abord en Inde qu'EDF compte vendre six réacteurs EPR pour créer la plus grande centrale nucléaire mondiale à Jaitapur. Après des années de discussions, le groupe a enfin présenté vendredi une offre engageante, ouvrant la voie à un accord ces prochains mois.
EDF discute aussi avec des pays européens comme la Pologne ou la République Tchèque.
Le groupe travaille aussi sur une nouvelle version de l'EPR, pour réduire ses coûts et ses délais de construction. En France, le gouvernement veut avoir tous les éléments en main à la mi-2021 mais la décision sur d'éventuels nouveaux chantiers a été renvoyée au prochain quinquennat.
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