L'économie verte créatrice d'emplois mais potentiellement inégalitaire (étude)

Des millions d'emplois pourraient être créés dans le monde d'ici 2030 dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, mais potentiellement aux dépens des femmes et des pays les plus pauvres, souligne un rapport de l'OIT cette semaine.

Les actions pour limiter le réchauffement climatique en-dessous de 2°C pourraient aboutir à la création de 24 millions d'emplois, compensant une perte parallèle de 6 millions, calcule l'Organisation internationale du travail.

Mais elles feraient aussi "légèrement baisser la part des femmes dans l'emploi total", souligne ce rapport intitulé "Emploi et questions sociales dans le monde 2018: une économie verte et créatrice d'emplois".

"Ce résultat n'est pas surprenant. Quand on parle de transition énergétique, ça veut dire plus d'éoliennes, plus de géothermie, plus de voitures électriques, et on sait que les énergies renouvelables, la manufacture et la construction sont des secteurs masculins", explique Catherine Saget, auteure principale du rapport.

Les femmes sont "sous-représentées" dans le secteur des énergies renouvelables des économies les plus avancées (20 à 25%), selon l'OIT, même si leur proportion augmente.

En France, la part de femmes travaillant dans la production et la distribution d'énergie et d'eau est ainsi passée de 15% en 2008 à 21% en 2012.

En cause: les inégalités d'accès à la formation et aux emplois qualifiés.

Et "sans efforts délibérés" des Etats, "la participation des femmes à l'économie verte ne croîtra pas assez rapidement pour combler le fossé entre les sexes" en termes d'emplois et de rémunérations, préviennent les auteurs.

Par ailleurs, la transition énergétique ne doit "laisser personne derrière" et doit "proposer un minimum de formation ou de protection sociale aux gens qui vont perdre leur emploi dans certains secteurs", soutient Mme Saget, qui insiste sur le rôle des syndicats pour défendre "les groupes désavantagés comme les femmes et les moins qualifiés".

Lors de la 23e conférence sur le climat (COP23), à Bonn en 2017, les Nations unies ont intégré l'enjeu de l'égalité hommes-femmes dans la transition énergétique.

Mais cette question n'apparait "pas systématiquement dans la conception des politiques nationales pour la lutte contre le réchauffement climatique", relève Catherine Saget.

Autre point souligné par l'OIT, la nécessité de politiques appropriées pour "contrebalancer les pertes d'emploi anticipées ou leurs effets négatifs" dans les régions du monde les plus pauvres.

"Les pays à faible revenu et certains pays à revenu intermédiaire ont encore besoin d'aide pour (...) adopter et financer des stratégies en faveur d'une juste transition vers une économie durable sur le plan environnemental", explique Mme Saget.

En effet, si le développement des emplois verts devrait profiter aux Amériques (3 millions d'emplois créés), à l'Asie-Pacifique (14 millions), et à l'Europe (2 millions), des pertes nettes sont prévues en Afrique (-350.000) et au Moyen-Orient (-300.000), selon les chiffres de l'OIT.

Des pertes qui s'expliquent principalement par "la dépendance à l'égard des énergies fossiles et des mines".

Pour autant, la directrice générale adjointe de l'OIT, Deborah Greenfield, veut diffuser "un message positif".

Même si des mesures sont nécessaires pour contrecarrer les inégalités des gains de l'économie verte, celle-ci "peut permettre à des millions de personnes supplémentaires de surmonter la pauvreté", affirme-t-elle.

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