Pouvoir d'achat, uniforme à l'école, fin des zones à faibles émissions: les députés du Rassemblement national défendent jeudi à l'Assemblée plusieurs textes, dont le rejet probable apportera la preuve selon eux du "sectarisme" des autres groupes politiques.
Le sort des sept propositions de loi à l'ordre du jour de l'hémicycle, dans le cadre de la journée réservée du groupe de Marine Le Pen, semble scellé, après leur rejet en commissions.
Mais le principal groupe d'opposition compte tout de même profiter de sa "niche parlementaire" pour dérouler ses thèmes favoris - à l'exception notable de l'immigration - et poursuivre sa quête de normalisation et de crédibilité auprès de l'opinion.
"J'en attends d'abord que les Français constatent que nous avons respecté notre promesse", avec "des textes concrets pour améliorer leur vie quotidienne", a fait valoir mercredi Marine Le Pen, cheffe de file des députés RN, devant l'Association des journalistes parlementaires (AJP).
La "niche" du RN a démarré jeudi matin avec l'examen d'un texte visant "à inciter les entreprises à augmenter les salaires nets de 10%", via un gel des cotisations patronales.
Il sera suivi d'une proposition pour supprimer les "zones à faibles émissions" (ZFE) qui interdisent les véhicules les plus polluants dans les agglomérations, une "mesure anti-pauvres" et incarnant une "écologie punitive" selon le parti d'extrême droite.
- Uniforme à l'école -
Des textes instituant la proportionnelle aux législatives ou créant "une présomption de légitime défense" pour les forces de l'ordre sont aussi au programme, mais plus loin dans l'ordre de passage et avec moins de chances d'être examinés, une "niche parlementaire" devant s'achever à minuit.
La proposition de rendre obligatoire dans les écoles et collèges publics le port d'une "tenue uniforme", dont chaque établissement pourra fixer "la coupe et la couleur", est inscrite en quatrième place, et pourrait être débattue dans le temps imparti.
L'objectif est d'"éviter la pression" des "islamistes" et de mettre fin au "concours aux habits les plus chers, les plus luxueux, les plus à la mode", plaide Marine Le Pen.
Ce texte est l'un des seuls qui aura jeudi l'appui d'autres bancs, les députés du groupe Les Républicains ayant reçu la consigne de le soutenir, comme ceux sur les ZFE et sur les forces de l'ordre, proches de leurs propres propositions.
Mais l'uniforme à l'école est vivement combattu par la gauche. Et même si certains députés macronistes le voient d'un bon oeil, et que Renaissance a créé un groupe de travail sur le sujet, le camp présidentiel critique un texte rédigé sans "un travail sérieux sur l'impact".
"Je ne veux pas de loi à ce sujet", a encore dit la semaine dernière le ministre de l'Education Pap Ndiaye, relevant qu'un établissement pouvait déjà en instaurer au niveau local. Dans un entretien publié mercredi dans Le Parisien, Brigitte Macron s'est, elle, prononcée en faveur de l'uniforme.
- "C'est minable" -
Marine Le Pen estime en tout cas avoir mis sur la table jeudi des textes pouvant recueillir des majorités si les députés "votaient en fonction de leurs idées" au lieu de les rejeter "pour ne pas mélanger leur voix avec celle du RN".
"C'est minable", dit-elle, estimant qu'il s'agit d'un "sectarisme" que "les Français vont juger durement".
Malgré l'obtention inédite de deux vice-présidences ou encore l'attribution de présidences de groupes d'amitié, les 88 députés RN restent mis à l'écart à l'Assemblée.
Ils avaient surpris leurs adversaires de gauche en soutenant leur première motion de censure, à l'automne, mais ces derniers ne leur avaient pas renvoyé l'ascenseur. Et la majorité n'a pas négocié d'amendements avec eux, comme elle a pu le faire avec les autres oppositions.
Face à ces barrages, le RN avait tenté une parade, en inscrivant au menu de sa "niche" des textes venant d'autres bancs, mais sans succès. La France insoumise avait ainsi préféré retirer son texte sur la réintégration des soignants non-vaccinés, plutôt que de le voir repris dans une "niche" du RN.