Le mentorat, un soutien pour les jeunes qui monte en puissance

Lutte contre les inégalités, développement du réseau, mais aussi écoute, confiance et "bienveillance": outil d'accompagnement pour les jeunes encore relativement méconnu, le mentorat, que l'exécutif a décidé de booster, a été pour certains "une bouée de sauvetage" face à la crise du Covid-19.

Avec le mentorat, un jeune est épaulé bénévolement par un adulte qui lui fait bénéficier de son expertise professionnelle et de ses conseils. Cela peut se faire pendant le parcours scolaire, dans les choix d'orientation ou encore en début de parcours professionnel.

Pour accroître le nombre de jeunes qui en bénéficient, Emmanuel Macron a lancé en mars "un jeune un mentor", avec l'objectif de passer de 25.000 à 100.000 "binômes" cette année, et 200.000 l'an prochain.

Inscrit dans le cadre du plan "1 jeune, 1 solution", le dispositif vise notamment à soutenir les associations et entreprises impliquées et à en convaincre d'autres, pour un budget d'environ 30 millions d'euros pour 2021. En juillet, une centaine de patrons de grands groupes se sont engagés à jouer le jeu dans une tribune dans le Journal du dimanche.

Selon Thibault Guilluy, Haut-commissaire à l'emploi et à l'engagement des entreprises, le premier appel à projet qui a donné ses résultats en juin représente "à peu près 75.000 mentorats". Un deuxième appel, prévu sous peu, doit permettre de couvrir "le dernier kilomètre", dit-il, "assez confiant sur le fait d'atteindre l'objectif des 100.000" en fin d'année.

Concrètement, les "binômes" - encadrés par une association comme "Proxité", "Article 1" ou encore "Nos quartiers ont du talent" - se rencontrent régulièrement pendant au moins six mois, et parfois jusqu'à 3 ou 4 ans.

"Ce temps là, il est puissant parce que c'est quand même quelqu'un qui prend de son temps bénévolement pour un jeune. Cela apporte de l'écoute, de la confiance et aussi un effet miroir" avec une personne expérimentée, vante M. Guilluy, en visite cette semaine au sein d'une des associations mobilisées, Moovjee.

Le Haut-commissaire y voit aussi "un bel outil pour lutter contre les déterminismes sociaux", chaque pont entre un jeune et un mentor étant un "lien qui vient innerver positivement la société".

- "Sortir de sa bulle" -

Accompagnée au sein de Moovjee, qui vise 850 mentorés d'ici fin 2021, Charlotte, jeune entrepreneure de 30 ans, évoque une "relation de petite soeur/grande-soeur", avec sa mentor avec laquelle elle a été en contact pendant un an.

"Et surtout, elle m'a accompagnée pendant la crise", dit cette jeune co-fondatrice de "Prune", solution de restauration éco-responsable. "On était vraiment dans une situation très compliquée... avec beaucoup de clients en hôtellerie. Ce qu'elle m'a apporté, c'était la possibilité de prendre du recul et de voir qu'on n'était pas les seuls à galérer".

Même si sa mentor vient d'un tout autre secteur, la communication, "on vivait la même chose", c'était "un peu une bouée de sauvetage dans les moments difficiles", dit la jeune femme, qui trouve encore aujourd'hui que "la reprise se fait tarder", évoquant des difficultés de trésorerie.

"On peut tout raconter à son mentor", renchérit Nicolas, 32 ans, qui a co-fondé une entreprise avec des amis d'enfance, vantant lui aussi un côté "vraiment famille".

A leurs côtés, le président fondateur de Moovjee, Dominique Restino, salue la mobilisation actuelle autour de ce sujet: "quand ça fait 15 ans que vous cherchez de l'argent pour développer quelque chose qui est véritablement efficace (...) c'est bienvenu que l'État vienne apporter sa pierre à l'édifice".

Au départ, Bastien, 32 ans, lui, ne "voyait pas trop l'intérêt". Mais in fine "ça a été un peu la révélation", assure le co-fondateur de Jimini's qui entend "faire manger des insectes aux Français". Son mentor lui a notamment permis de "trouver la bonne relation" avec des salariés du même âge. Et "ça amène aussi de l'extra-professionnel", dit-il, confessant avoir évoqué avec lui son "stress" de devenir papa.

Résultat, il a aujourd'hui bouclé la boucle en devenant lui-même mentor, ce qui lui permet de "sortir de sa bulle".