Laurent Berger ou la recherche du compromis, coûte que coûte

A la tête de la CFDT depuis 2012, Laurent Berger est un fervent défenseur de la concertation et du compromis, qu'il juge bien plus efficaces que les manifestations, une position parfois mal comprise en interne.

Candidat unique à sa succession, ce quasi quinqua --50 ans le 27 octobre--, natif de Guérande (Loire-Atlantique) doit être reconduit sans surprise lors du congrès qui se tiendra du 4 au 8 juin à Rennes.

Lorsqu'il arrive à la tête de la CFDT, au tout début du quinquennat Hollande, son syndicat a l'oreille de l'exécutif.

La confédération accompagnera toutes les réformes sociales, y compris la très controversée loi travail de 2016, quitte à être qualifiée de "relais" du gouvernement.

Mais la donne change avec l'arrivée de Macron, pressé de réformer et moins à l'écoute des "corps intermédiaires" que son prédécesseur.

Depuis janvier, le secrétaire général de la CFDT ne cesse de faire des appels du pied insistants au président de la République, "exigeant d'être entendu dans ses propositions", en vain.

Pour autant, ni la "convergence des luttes", ni les manifs, qu'il juge inefficaces, ne sont sa tasse de thé. A quelques exceptions près, puisqu'il aura manifesté trois fois depuis le début du quinquennat pour soutenir la fonction publique.

Avec son homologue de la CGT, Philippe Martinez, les échanges sont à fleuret moucheté, mais les deux hommes se respectent et s'apprécient.

Comme son prédécesseur François Chérèque, décédé en janvier 2017, la concertation et la négociation sont pour lui des leitmotivs. Pour lui, s'engager dans une concertation n'est "pas faire preuve de faiblesse" mais "de courage politique" et d'"efficacité".

En automne dernier, c'est la ligne qu'il suivra avec la réforme du code du travail par ordonnances. Mais une partie de la base réclamera des manifestations contre ce texte "inadmissible" et un message "plus combatif" de leur numéro un, qui se contente de qualifier le texte "d'occasion manquée".

- "Etagère du vieux monde" -

Le rassemblement du 3 octobre 2017, destiné à fêter la première place de la CFDT dans le privé, va rester un mauvais souvenir pour le secrétaire général.

Ce qui devait être une grand-messe se transforme en pugilat contre les ordonnances et tout particulièrement contre Laurent Berger. Lui restera inflexible: "Ne donnons pas au gouvernement les arguments pour nous ranger sur l'étagère du vieux monde, au rayon des râleurs impuissants", répondra-t-il.

Sur la SNCF, fin mars, il prend aussi de court ses troupes avec un discours ouvert sur la négociation avec le gouvernement, nettement moins offensif que la CFDT-Cheminots, en grève depuis début avril avec la CGT-cheminots, l'Unsa et SUD-rail. Puis il monte le ton mais brille par son absence lors d'une manifestation nationale des cheminots.

Conscient que sa stratégie peut interpeller, il s'attend à des débats "animés" au congrès de Rennes.

Maîtrisant les dossiers sociaux, affable et souriant, Laurent Berger, qui refuse toute étiquette politique, peut se montrer virulent, surtout quand il s'agit de défendre les migrants ou les précaires, à travers tribunes, interviews ou lettres ouvertes, ce qui n'est pas pour déplaire en interne.

Avant d'entamer sa carrière syndicale, Laurent Berger a été lui-même confronté au chômage et a côtoyé la précarité en tant que conseiller en insertion professionnelle. Fils d'un ouvrier soudeur des chantiers navals de Saint-Nazaire, il a été responsable de la Jeunesse ouvrière chrétienne pendant trois ans à Paris, de 1991 à 1994.

Titulaire d'une maîtrise d'histoire de l'université de Nantes, il a intégré l'Union locale de la CFDT de Saint-Nazaire, devenant permanent en 1996 jusqu'en 2002, puis gravissant les échelons de l'appareil cédétiste. Secrétaire général de l'union régionale Pays-de-la-Loire en 2003, il entre en 2009 dans le saint des saints: la commission exécutive, direction de la CFDT.

Très discret sur sa vie privée, il est marié et père de trois enfants.

Au cours du dernier mandat, il a écrit ou co-écrit trois ouvrages: "Permis de construire", "Réinventer le progrès" (avec le directeur général du WWF France, Pascal Canfin) et "Au boulot!".

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