Après des années de débats, les scientifiques gardiens de la géologie mondiale ont décidé de ne pas accorder à l'Anthropocène, une époque caractérisée par les traces de la présence humaine partout sur la planète, une place à part dans l'histoire géologique de la Terre.
Si l'impact des activités humaines - montée en flèche des gaz à effet de serre, propagation des microplastiques et autres pollutions de tous genres, extinctions massives d'espèces - n'est pas nié, cela ne signifie pas pour autant que nous sommes sortis de l'Holocène, la période géologique débutée il y a environ 12.000 ans à la fin de la dernière glaciation, pour entrer dans l'"époque de l'Humain", a estimé l'Union internationale des sciences géologiques.
La décision "de rejeter la proposition d'une époque anthropocène comme unité formelle de l'échelle des temps géologiques est approuvée", a fait savoir un communiqué de l'organisation publié jeudi.
Il y a eu quatre voix pour, 12 contre et trois abstentions, est-il précisé.
Il n'existe aucune voie d'appel, mais certains membres du comité de vote ont fait part de leurs doutes concernant le déroulement du scrutin et la régularité de la procédure.
Des allégations rejetées en bloc par l'Union internationale des sciences géologiques, qui estime que même s'il ne constitue pas à proprement une nouvelle époque géologique, le terme Anthropocène restera largement utilisé.
"Il restera un descripteur inestimable de l'impact humain sur le système Terre", a reconnu l'organisme, réputé intransigeant sur les modifications de la Charte chronostratigraphique internationale.
Il n'y a aucun désaccord sur le fait que "l'âge de l'homme" a entraîné de profonds changements planétaires, note Erle Ellis, un scientifique environnemental critique de la proposition de l'Anthropocène.
Depuis 2009, un groupe de travail composé de scientifiques s'était consacré à déterminer dans quelle mesure l'humanité avait changé d'époque géologique, depuis quand et quels en étaient les signes les plus emblématiques.
En juillet, les membres de ce groupe avaient choisi le lac Crawford, près de Toronto au Canada, comme étant le site de référence mondial du commencement de l'Anthropocène.
Les sédiments stratifiés au fond de cette petite étendue d'eau d'un kilomètre carré, chargés de microplastiques, de cendres de combustion du pétrole et du charbon, et de retombées des explosions de bombes nucléaires, constituent la meilleure preuve qu'un nouveau chapitre de l'histoire de la Terre s'est ouvert, avaient alors conclu ces scientifiques.
Pour Martin Head, professeur de sciences de la Terre à l'Université Brock au Canada et partisan de la reconnaissance de l'Anthropocène, il existe "une myriade de signaux géologiques" de cette nouvelle époque.
Le rejet par l'IUGS est "une occasion manquée de reconnaître et d'approuver une réalité simple, à savoir que notre planète a quitté son état de fonctionnement naturel au milieu du XXe siècle", a-t-il déclaré à l'AFP.