La part des produits alimentaires biologiques dans le panier de courses des Français a reculé de 6,4% à 6% sur un an en 2022, a indiqué l'Agence bio jeudi, illustrant la crise que traverse le secteur avec un besoin "urgent" de relancer la demande.
Les achats de bio se sont repliés dans un contexte de "recul inédit" de la consommation alimentaire globale à domicile des ménages (-5,1%), dont le pouvoir d'achat s'est amoindri avec l'inflation, a souligné cette agence, chargée de la promotion du bio, lors d'une conférence de presse.
En comparaison, la part de bio dépasse 10% dans les caddies d'autres pays européens comme le Danemark ou l'Autriche, qui ont des politiques "très volontaristes", selon sa directrice, Laure Verdeau.
Les ventes de produits bio pour la consommation à domicile, qui représentent 92% des débouchés du secteur, ont baissé en valeur de 4,6% l'an passé, s'établissant à 12 milliards d'euros.
"La plus forte baisse touche les 3.000 magasins bio, avec une chute de la fréquentation et près de 200 fermetures", a indiqué Mme Verdeau. Leurs ventes se replient de 8,6%, et celles de la grande distribution de 4,6%.
A l'inverse, les 26.000 fermes bio, "qui font la conjugaison du bio et du local, sont en croissance", a-t-elle ajouté, avec des ventes qui progressent de 3,9%.
En 2021, les ventes de produits bio destinés à la consommation à domicile (supermarchés, vente à la ferme, etc.) avaient déjà reculé de 1,4%, une première baisse inédite depuis 2010.
Les ventes de produits pour la consommation hors domicile ont, en revanche, augmenté de 17% en 2022, première année de pleine reprise de l'activité pour les restaurants après la pandémie de Covid-19.
La part des denrées bio reste stable dans la restauration collective avec 7% des achats - encore loin de l'objectif de 20% fixé en 2018 dans la loi Egalim - et tombe de 2% à 1% dans la restauration commerciale, pour laquelle "tout reste à faire", a estimé Mme Verdeau.
Pour répondre au besoin "urgent" de relancer la consommation, le ministre de l'Agriculture a annoncé mi-mai une "enveloppe de crise" dotée de 60 millions d'euros.
"On a besoin des pouvoirs publics pour passer le cap, ou les éleveurs risquent de se déconvertir car la demande n'est pas là en ce moment", a réagi auprès de l'AFP Philippe Sellier, président de la commission bio d'Interbev (interprofession bétail et viande). "On est incapables de convaincre des gens de passer en bio s'ils ne peuvent pas valoriser leur travail", a ajouté cet éleveur de vaches en Normandie.
En 2022, 10,7% des surfaces agricoles ont été cultivées en agriculture biologique, un chiffre qui stagne par rapport à 2021. La France ambitionne d'atteindre 18% en 2027.
Avec la baisse de la demande, les surfaces en première année de conversion vers cette agriculture sans pesticides ni engrais chimiques ont chuté de 40%.
Le solde entre les arrivées et les sorties du bio "reste encore positif, mais traduit un réel coup de frein de la dynamique de conversion", selon l'agence.