La convention citoyenne entend contribuer à la sortie de crise

Soignants, retraités, salariés... Touchés comme l'ensemble des Français par le coronavirus, les participants de la Convention citoyenne pour le climat ont décidé d'apporter leur contribution pour que la crise sanitaire ne se double pas d'une crise sociale et climatique.

La Convention citoyenne devait finaliser début avril ses travaux pour lutter contre le changement climatique dans un esprit de justice sociale, avant de les présenter à l'exécutif. Le covid-19 a bousculé son agenda et sa dernière session a été repoussée sine die.

Pour ne pas rater le train en marche, elle a tenu une session spéciale les 4 et 5 avril (une réunion virtuelle en raison du confinement) avec environ 110 participants et a rendu une partie de sa copie avec un peu d'avance.

Vendredi, elle a transmis 50 propositions à l'exécutif, appelant à ériger "un modèle économique et sociétal différent, plus humain et plus résilient".

Ces mesures ne sont pas publiques mais elles vont dans le sens d'investissements vers "des secteurs d'avenir respectueux du climat", d'une "relocalisation des activités sur des secteurs stratégiques" avec comme souci "notre santé et notre bien-être collectifs".

"Tout est à l'arrêt" avec le confinement, constate Hugues-Olivier, photographe de 60 ans et l'un des 150 membres de la Convention. Quand la crise sanitaire sera résorbée, il faudra "repartir du bon pied", dit-il à l'AFP.

Avec l'économie à l'arrêt, les émissions de gaz à effet de serre diminuent. Mais l'expérience des précédentes crises, comme celles de 2008, montre qu'elles risquent de repartir de plus belle par la suite.

La décision de publier une contribution et de transmettre au gouvernement des mesures non finalisées et pas votées, faute de session finale, n'a pas fait l'unanimité.

Pour Sylvie, inactive, qui vit dans la banlieue de Nancy, "les priorités sont ailleurs": "nous n'aurons aucune visibilité, nous risquons de perdre toute crédibilité", craint-elle.

Elle relève que cette décision "ne respecte pas le processus démocratique prévu" et que la Convention n'a "aucune garantie" que l'exécutif tienne compte des préconisations rendues vendredi.

- "S'adapter tout de suite" -

Venus de toute la France, de tous âges et de tous horizons, les 150 citoyens planchent depuis six mois sur des mesures pour "réduire d'au moins 40% les émissions des gaz à effet de serre d'ici à 2030 dans une logique de justice sociale".

Emmanuel Macron a voulu cette initiative inédite en France pour ne pas répéter l'erreur d'une taxe carbone jugée injuste, qui avait poussé les gilets jaunes sur les ronds-points.

Elle s'inspire d'une expérience irlandaise qui a conduit à dépénaliser l'avortement par référendum.

Le président français a promis en janvier que des "décisions fortes" seraient prises sur la base des propositions finales pour lutter contre le réchauffement, dont certaines pourront être soumises à référendum.

Mélanie, 36 ans, juge "pertinent" que la Convention apporte sa pierre à l'édifice, en ces temps de crise, même si ses travaux n'ont pas tout à fait abouti.

"Il faut une relance économique, mais dans le sens d'une transition" énergétique, estime cette responsable d'une agence événementielle, en télétravail le temps du confinement.

Au moment où le gouvernement promet des milliards d'euros pour soutenir les secteurs touchés par la crise, "il ne faut pas que cela aille vers des activités carbonées", abonde Hugues-Olivier.

L'avantage des solutions imaginées par les 150 citoyens? Elles peuvent "s'adapter tout de suite" pour relancer l'emploi, aider les gens qui se retrouvent d'un coup "au bord du gouffre", sans que ce soit néfaste pour l'environnement, s'enthousiame-t-il.

Cette crise, en faisant voler en éclats dogmes et habitudes, peut-elle être l'occasion de changements profonds? Hugues-Olivier constate en tout cas que sa femme peut télétravailler alors que son employeur s'y opposait jusqu'à présent, et que "ça marche très bien".

Mélanie, en s'informant sur le changement climatique, dit avoir "compris très tôt qu'il y aurait une crise, sans qu'on sache quand. C'était inévitable". "Une crise climatique pourrait malheureusement être encore plus grave", s'alarme-t-elle.

Pour y faire face, "la participation citoyenne devient incontournable, l'intelligence collective est bénéfique", argumente-t-elle.

"Il faudra tirer toutes les conséquences pour ne pas refaire les mêmes conneries", conclut Hugues-Olivier.