La Chambre régionale des comptes étrille la gestion de l'aéroport de Tours

La Chambre régionale des comptes du Centre-Val de Loire a critiqué jeudi la gestion dispendieuse de l'aéroport de Tours par les collectivités locales, pointant des retombées économiques "modestes" et une "délégation de service public déséquilibrée au profit" de la société exploitante Edeis.

Dans un rapport, la Chambre pointe les défauts de gestion du Syndicat mixte pour l'aménagement et le développement de l'aéroport (Smadait), émanation de Tours Métropole, de la région Centre-Val de Loire et du département d'Indre-et-Loire.

Le Smadait a "versé au-delà de ses obligations contractuelles 2,087 millions d'euros à son délégataire sans aucune contrepartie et permettant même à ce dernier de distribuer des dividendes alors que l'exploitation réelle est déficitaire", relève-t-elle.

"Le haut niveau de subventionnement de l'aéroport assure une rentabilité particulièrement forte au délégataire", le groupe Edeis, premier gestionnaire d'aéroports régionaux en France, insistent les magistrats, selon lesquels "les résultats nets, positifs et croissants, des exercices 2014 à 2018 ont été distribués intégralement sous forme de dividendes".

"De 2011 à 2019, le trafic passager accueilli par l'aéroport de Tours-Val de Loire a enregistré une croissance de 63%, fondée quasi-exclusivement sur le trafic à bas coût qui représente 95,6% de l'activité", écrit aussi la Chambre qui évoque un développement réalisé "au prix d'un subventionnement public massif de compagnies aériennes".

"Ce soutien financier apparaît avoir bénéficié exclusivement à la compagnie aérienne Ryanair qui réalise la quasi- totalité du trafic passager au départ et à l'arrivée de la plateforme de Tours", précise la Chambre.

Les contributions au développement du trafic passagers ont atteint 15,2 millions d'euros de 2014 à 2019. Or, "les retombées économiques directes et indirectes, difficilement évaluables, apparaissent modestes au regard des moyens investis et des résultats d'aéroports comparables", pointe la Chambre.

-"Un tableau clinique implacable"-

L'aéroport est en outre confronté au départ de l'armée de l'Air et de l'Espace, qui assumait une partie des frais de fonctionnement, et aux "transformations actuelles du transport aérien liées à la pandémie de Covid-19 et aux enjeux environnementaux". De quoi "fragiliser la pérennité du modèle de développement actuel".

Le rapport dresse "un tableau clinique implacable", a réagi la mairie (EELV) de Tours décrivant "une structure gourmande en deniers publics mais sans réel pilotage politique, et dont les orientations stratégiques se font hors du sol et du temps, sans prise en compte conséquente des besoins du territoire et du contexte global de crise de l'aérien".

La ville appelle à de "nécessaires mutations du site", avec notamment la création d'un "pôle d'innovation régional en faveur des énergies renouvelables et de l'économie zéro carbone".

A l"inverse, le groupe Edeis s'est dit "fier de son bilan de gestion", estimant "avoir rempli les missions qui lui ont été confiées", notamment "une augmentation du trafic aérien au-delà (des) engagements contractuels" et un "développement des missions aéronautiques de service public".

La société a précisé avoir "hérité" du contrat, signé avec SNC Lavallin, racheté par Edeis. "Depuis lors, un travail commun entre le syndicat mixte et Edeis a permis un rééquilibrage de ce contrat au profit de la collectivité", a-t-elle insisté.

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