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Analyses

Pendant la crise, les Français sont passés à l’action

Selon l’AMF, quelque 150 000 particuliers ont fait leur entrée sur le marché entre fin février et début avril.

La chute des marchés n’aura pas effrayé tous les Français, bien au contraire. Selon une étude publiée il y a quelques semaines par l’AMF, entre fin février et début avril, les achats d’actions françaises par des particuliers ont été multipliés par 4 par rapport à la même période l’an dernier, pour un montant net total de 3,5 milliards d’euros investis.

Ainsi, 580 000 particuliers ont acheté des actions du SBF 120 sur cet intervalle particulièrement chahuté, dont 150 000 nouveaux arrivants "n’ayant effectué aucune transaction en direct sur instrument financier en 2018 et 2019". Particularités, ces derniers sont en moyenne 10 à 15 ans plus jeunes "que les investisseurs habituels", et ont investi des sommes moins importantes.

Tous profils confondus, ces particuliers ont acheté en moyenne 3,5 titres et les ont en majorité conservé sur la période. "S’il est trop tôt pour parler d’investissement de long terme, il est notable que 90 % des positions prises à l’achat avaient été conservées à la fin des 6 semaines de crise observées, seules 10 % ayant fait l’objet d’allers-retours opportunistes ou de réallocation d’actifs", note le gendarme boursier.

De quoi signifier la fin du désamour entre les Français et le risque ? Pas nécessairement quand dans le même temps, par choix ou contraints par les mesures de confinements, ces derniers ont fait exploser les records de collecte sur le livret A, avec 5,5 milliards d’euros collectés en avril. En comptant le Livret de développement durable et solidaire (LDDS), les chiffres atteignent même 7,39 milliards.

Tous établissements confondus, la médiane des achats effectués par des investisseurs 'historiques' a été d’environ 5 000 €, tandis que la médiane des achats effectués par les 'nouveaux' investisseurs a été d’environ 2 500€, soit 2 fois inférieure, AMF

3 questions à... Karl Toussaint du Wast co-fondateur de Netinvestissement

Globalement quel com- portement avez-vous observé chez les investisseurs particuliers depuis le début de l’année ?

Ce que nous avons constaté c’est un intérêt marqué pour un retour en bourse. Pendant le confinement, nous avons en effet été très sollicités pour savoir ce qu’il fallait faire, si c’était le bon moment pour investir en bourse et si oui, sur "quoi" ? Nos clients netinvestisseurs, déjà habitués à nos performances, en ont redemandé, mais nous avons été étonnés de l’appétence et de l’intérêt des Français qui nous ont contactés alors qu’ils n’étaient pas encore clients.

Quelle a été votre stratégie face à la chute des marchés ?

Nous avions décidé d’arbitrer 90 % de nos portefeuilles sous gestion au tout début du mois de février, avant l’arrivée de la COVID donc, car nous considérions les marchés financiers très hauts à ce moment-là.

Ce choix de désensibiliser les portefeuilles (qui avait comme objectif principal d’encaisser et de sécuriser les plus-values générées) nous a per- mis de particulièrement bien résister à la chute des marchés. Ainsi, quand ces derniers perdaient -35 % nos contrats subissaient une baisse de seulement -7 %. Ce choix stratégique, en amont de l’arrivée de la crise, a non seulement rassuré nos clients mais cela a été l’occasion surtout de les faire re-rentrer sur les marchés sur des points d’entrée très bas et donc, dans des conditions idéales. Entre le 15 avril et le 25 mai nos portefeuilles ont déjà rebondi de plus de 15 % ce qui nous a permis non seulement de combler les 7 % de baisse mais également de performer d’ores et déjà de +8%.

Pour nos clients les plus prudents, nous privilégions les produits structurés ce qui leur permet de clairement connaitre le rendement visé (en général entre 6 et 8 % actuellement par an) mais surtout ce que l’on appelle la "barrière de protection" c’est-à-dire le niveau en dessous duquel le sous-jacent (indice ou action) ne doit pas descendre. Ainsi avec un produit structuré prudent, nous pouvons protéger le capital avec une barrière à -50 % par exemple tout en versant un coupon de rendement annuel de 7 % par exemple. Et les clients adorent !

Quelle place pourrait selon vous prendre l’investissement socialement responsable dans les prochains mois ?

La quête de sens de nos actes, de nos choix et de nos décisions s’est très largement développée depuis quelques années. L’émancipation du bio, la promotion des circuits courts et le soutien de plus en plus important aux "petits producteurs" et au "made in France" se ressent dans la société et dans les nouvelles façons de consommer. Or l’investissement et les placements financiers sont également concernés par ce changement profond de paradigme. Chez Nestinvestissement, nous avons été pionniers dans la mise en avant des solutions d’investissement éthiques et responsables en intégrant dans nos allocations dès 2017 les premiers fonds ISR.

Mais ce qui était au départ une conviction profonde de notre part est devenue de plus en plus impor- tant et demandé par nos clients. Aujourd’hui la plupart de nos portefeuilles détiennent au moins 10 % de fonds ISR ou ESG et nous avons même une allocation spéciale "100% ISR" dont le rendement est d’ailleurs supérieur à la moyenne actuellement car plus résilient.

Les investisseurs ne sont plus seulement en quête de profit et de plus-value, ils veulent investir leur argent dans des sociétés ou des secteurs qui répondent à leurs valeurs. L’émancipation des fonds ISR ira de pair avec la poursuite des changements de consommation des Français.

*Propos recueillis le 28 mai 2020.

 

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