A Grenoble, l'Europe pose les bases de sa souveraineté en "aimants permanents"

La start-up française MagREEsource a inauguré jeudi à Grenoble la première usine-test en Europe de production d'aimants permanents à partir d'aimants recyclés, composés essentiels de la transition énergétique, gourmands en terres rares et très utilisés dans les éoliennes et les véhicules électriques.

"Il s'agit de la première usine en France et en Europe" qui produira 50 tonnes par an d'aimants frittés haute performance "fabriqués entièrement à partir de matière recyclée" et qui "garantira une souveraineté sur un marché international ultra-dominé par la Chine", a expliqué à l'AFP Erick Petit, président et cofondateur de MagREEsource.

Les aimants permanents à base de terres rares (néodyme, dysprosium..) - qui résistent dans le temps à la démagnétisation - sont un élément stratégique de la transition climatique en cours, car ils équipent aussi bien des véhicules électriques que des éoliennes (50% du marché pour ces deux secteurs). Ils sont aussi présents aussi dans la robotique, l'électronique ou les pompes.

On trouve "1 kilo d'aimant par moteur de voiture électrique et 10 tonnes par génératrice d'éolienne", a souligné M. Petit qui a confondé MagREEsource en 2020, issue de 25 ans de recherches du CNRS à Grenoble.

L'inauguration du site, à Noyarey dans l'Isère, a eu lieu en présence de Milan Grohol, haut responsable de la Commission européenne, après 18 mois de travaux et 8,5 millions d'euros d'investissement.

Elle intervient néanmoins six mois plus tard que le calendrier initialement prévu (fin 2023), "car les machines ont mis du temps à arriver" a indiqué M. Petit.

- Stocks dormants d'aimants -

L'usine-test utilise des stocks dormants d'aimants permanents récupérés sur des roues de trottinettes électriques ou des moteurs de véhicules ou d'éoliennes.

Ce premier site qui emploie 25 personnes (35 à terme), servira de démonstrateur industriel à un projet d'usine de plus grande ampleur, prévue également dans la région, pour laquelle l'État français a consenti une aide de 25 millions d'euros dans le cadre du plan France 2030-Métaux critiques.

La deuxième usine devra produire à partir de 2027 quelque 500 tonnes d'aimants permanents par an au démarrage et aller jusqu'à 1.000 tonnes en 2030, avec la création de 200 emplois directs envisagée, a précisé MagREEsource. Un partenariat avec Schneider Electric vient d'être annoncé pour améliorer son automatisation tout en réduisant l'empreinte carbone du site.

"Nos rares concurrents hors Chine ne sont pas en très bonne santé financière car ils produisent des aimants à partir de matière première issue de la mine, c'est-à-dire le plus souvent achetée en Chine", explique M. Petit.

"Or, pour protéger son marché, la Chine, qui a un monopole sur le marché des terres rares, vend les demi-produits à l'étranger très cher, ce qui rend difficile la compétitivité" des projets européens ou américains travaillant à partir de matière première vierge, souligne-t-il.

Avec le procédé de recyclage breveté par la start-up française, de l'hydrogène est insufflé directement au sein de la matière, ce qui la pulvérise et permet sa réutilisation.

La dernière usine en France qui produisait des aimants, Ugimag, ex-filiale de Pechiney basée entre Grenoble et Chambery, a fermé en 1999, après avoir été vendue à un groupe chinois qui a en démantelé les installations.

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