Grand débat: majorité et oppositions convergent sur le diagnostic, pas sur les remèdes

Près de 15 heures d'échanges, qualifiés par certains de "mascarade", quelque 120 orateurs : le "grand débat" des députés cette semaine a montré des convergences sur l'état du pays, mais des positions souvent irréconciliables sur les solutions.

Alors que le gouvernement n'a quasiment rien révélé de ses intentions, devant un hémicycle souvent clairsemé, des élus ont dénoncé tour à tour un "grand blabla", voire du "pata pata" et "bloublou" pour un député guyanais. Voici les points de consensus, les principales divergences et quelques lignes rouges sur les quatre thèmes de la consultation.

Transition écologique : quel financement?

A l'origine du mouvement des "gilets jaunes", à travers la taxe carbone sur les carburants, la question du financement de la transition écologique a été au coeur des débats. Plusieurs députés plaident pour que l'intégralité des recettes de la fiscalité environnementale soit "affectée à la transition énergétique".

La gauche de la gauche dénonce une culpabilisation "des ménages, de leurs modes de déplacement ou d'alimentation", alors que "les entreprises les plus polluantes sont presque exonérées". De leur côté, Les Républicains promeuvent "une écologie positive et responsable, porteuse de projets et d'emplois", et refusent d'"augmenter d'un centime la fiscalité sur les carburants d'ici la fin du quinquennat".

Les "marcheurs" ont proposé une grande loi de programmation pluriannuelle, à laquelle le ministre de la Transition écologique s'est montré favorable. Plusieurs groupes appellent à sortir les investissements écologiques de la règle européenne des 3% de déficit.

Selon François de Rugy, "la question de l'augmentation du prix du carburant a révélé une revendication pour plus de pouvoir d'achat, mais pas contre la fiscalité écologique".

Fiscalité : vers une meilleure progressivité

Redonner de la progressivité à l'impôt sur le revenu dépasse les clivages, mais les avis divergent sur la méthode : LR et LREM veulent réduire le barème des deux premières tranches, quand LFI aimerait créer des tranches supplémentaires. "Les impôt doivent baisser (...) notamment pour les classes moyennes modestes", mais avec une "baisse de la dépense publique", a fait valoir le ministre Bruno Le Maire, rejetant un "big bang fiscal".

Réindexer les retraites (ou seulement les plus basses) sur l'inflation fait globalement consensus. L'idée de revenir sur la hausse de CSG pour les retraités a été portée par plusieurs groupes, alors que l'exécutif l'a déjà supprimée en décembre pour cinq millions de personnes, parmi les plus modestes.

La gauche a réclamé le rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), une des principales revendications des "gilets jaunes". Mais cette piste a été exclue de manière répétée par Emmanuel Macron.

Démocratie : participation citoyenne accrue

"Crise" de la démocratie "aux racines profondes", "promesse républicaine" en déshérence ou encore "manquements du système politique" : les députés ont pris leur part dans cet échec, et veulent renouer avec les citoyens, via plus de participation directe, pour compléter la démocratie représentative.

Davantage de référendums locaux (LREM), "lois citoyennes" (MoDem), droit de pétition réhabilité et "questions au gouvernement citoyennes" (PS), ou encore référendums d'initiative partagée (RIP) facilités, comme réclamé notamment par LR: les idées foisonnent. L'"objectif" est "à portée de main", a embrayé la ministre de la Justice Nicole Belloubet, qui a cependant balayé le référendum d'initiative citoyenne (RIC) promu par LFI et PCF à l'unisson des "gilets jaunes".

Sur la reconnaissance du vote blanc, demande assez largement partagée (hors LR), Nicole Belloubet est prudente quant à "l'impact" sur "la légitimité des élus". Idem sur la dose de proportionnelle à introduire aux législatives (nulle pour LR, intégrale pour les extrêmes notamment).

Services publics : plus près des Français

Constat partagé : un "sentiment d'abandon" dans certains territoires et le "besoin de proximité", mais les réponses sont divergentes et souvent incantatoires, comme stopper la "casse", ou ne pas oublier l'"humain"...

Un nouveau chantier de "décentralisation", prôné par la majorité LREM-MoDem et au-delà, est au programme, Emmanuel Macron ayant lui-même donné le feu vert. Et le retour du conseiller territorial a l'assentiment des "marcheurs".

Ils proposent aussi des "guichets sociaux uniques" dans les mairies. Pour cela, il faudra "déconcentrer" : les administrations devront "dégraisser" dans les métropoles pour redéployer leurs effectifs.

LR demande "un grand plan Marshall" pour le déploiement du numérique, l'accès aux soins et la mobilité, tandis que l'UDI-Agir préconise que chaque citoyen ait les coordonnées d'un agent administratif, pour l'aider dans ses démarches.

Pour la gauche, il faut un "bouclier de services publics". LFI plaide pour des services publics fondamentaux "à moins de trente minutes" de chacun, même si ce n'est "pas rentable".

parl/jk/bma

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