Grand débat: Hulot, Berger (CFDT) et 19 organisations veulent lier écologie et social

A une semaine de la fin du grand débat national, Nicolas Hulot et le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger, forts du soutien de 19 organisations, sortent du bois en proposant un "big bang fiscal" et un meilleur partage du pouvoir, dans le cadre d'un pacte social et écologique comportant 66 propositions.

"Cette coalition veut rendre définitivement indissociables l'enjeu écologique et l'enjeu social", a déclaré mardi l'ancien ministre de la Transition écologique et solidaire d'Emmanuel Macron dans une interview au Monde avec le numéro un de la CFDT.

"Dans nos propositions, il y a deux choses. Premièrement, être capable d'extraire les investissements des critères européens", a-t-il dit, en sortant les investissements publics dans le secteur de la transition écologique du calcul des 3% de déficit public rapportés au PIB fixé par les règles européennes.

"Deuxièmement, il faut un big bang fiscal parce que la fiscalité actuelle n'est pas juste, que le partage de l'effort n'est pas équitable", a-t-il précisé.

Pour lui, Bercy doit faire "son deuil sur l'affectation de la taxe carbone au budget national": elle doit être aller "intégralement" à la dimension sociale.

"Nous avions dit que cette taxe carbone serait mal perçue et qu'on irait dans le mur", a dit de son côté, lors d'une conférence de presse, M. Berger. "On ne nous a pas entendus", a-t-il regretté, faisant référence au mouvement des "gilets jaunes".

Le pacte écologique et social est signé par 19 organisations environnementales, syndicales, des associations de luttes contre la pauvreté, sur le logement ou de jeunesse, qui sont "la voix de plusieurs millions de personnes", a dit M. Berger.

Le pacte sera porté notamment lors des quatre grandes conférences nationales du Grand débat qui se tiendront à Paris du 11 au 13 mars et lors de la Marche pour le climat le 16 mars. Il sera aussi adressé à l'ensemble des décideurs: membres du gouvernement, parlementaires, élus locaux, employeurs.

"Le grand débat est un exercice démocratique intéressant", mais "il est nécessaire d'avoir une réponse commune, et non celle du président seul", a renchéri Orlane François (La Fage).

- 'Une boussole utile' -

Le pacte se décline en quatre parties, "chacune alliant écologie et social", a précisé pour sa part Jean-David Abe, vice-président de France Nature Environnement. La première vise à "redonner du sens à la fraternité", a-t-il dit. Il faut ensuite remettre la justice sociale au coeur de l'économie, réconcilier transition écologique et justice sociale, et mieux partager le pouvoir et permettre la co-décision dans les politiques publiques.

Le pacte propose en particulier la création d'un observatoire vérifiant que les choix politiques se préoccupent des enjeux sociaux et environnementaux et d'une plus grande justice fiscale, a précisé Christophe Robert, de la Fondation Abbé Pierre.

De son côté, Claire Hédon (ATD Quart Monde) a souligné la nécessité d'évaluer l'impact de toute nouvelle loi et politique publique sur les 10% les plus pauvres de la population et au regard des objectifs de développement durable.

Au niveau fiscal, le pacte veut introduire une plus grande progressivité de l'impôt, une taxation des hauts patrimoines, la fin des dérogations bénéficiant aux revenus du capital, la réorientation des niches fiscales et les aides publiques au profit de l'emploi, de la transition écologique et à l'investissement social.

Critiquant "un exercice trop vertical" du pouvoir qui oublie les corps intermédiaires, ses auteurs préconisent une co-construction des politiques publiques en encourageant en particulier les initiatives citoyennes.

Cette initiative a reçu le soutien de nombreux politiques de gauche.

Le pacte constitue "une contribution importante dans le Grand Débat National, avec des propositions très concrètes", a jugé le député non inscrit Matthieu Orphelin, ex LREM et ex-EELV. "Travail précieux que nous sommes prêts à porter dans le débat avec tous ceux qui attendent une vraie renaissance", a tweeté de son côté le Premier secrétaire du PS Olivier Faure. "Je partage", a sobrement commenté la maire PS de Paris Anne Hidalgo.

Ces propositions "sont une boussole utile dans la période de divisions que traverse notre pays", a commenté l'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve (PS).