Les partis d'opposition soutenant les "gilets jaunes", Marine Le Pen en tête, ont accusé samedi le gouvernement de vouloir réduire le mouvement à des violences de "l'ultradroite" pour le décrédibiliser et rester sourd à leurs revendications.
Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a pointé à Paris des "séditieux" de "l'ultradroite" qui "ont répondu à l'appel notamment de Marine Le Pen" à défiler sur les Champs-Elysées, où des heurts ont opposé toute la journée les forces de l'ordre à des "gilets jaunes". Au niveau national, la mobilisation a cependant connu un "fort affaiblissement" par rapport à celle du 17 novembre, selon le ministre.
Marine Le Pen a aussitôt répliqué sur LCI qu'elle n'avait "jamais appelé à quelque violence que ce soit" et a accusé à son tour le gouvernement d'"organiser la tension" et de faire d'elle un "bouc émissaire".
La présidente du Rassemblement national (RN, ex FN), qui ne manifestait pas mais soutient le mouvement rejoint par des cadres et élus du parti, s'était étonnée vendredi qu'on n'autorise pas les "gilets jaunes" à défiler sur la célèbre avenue parisienne, après l'interdiction d'un rassemblement place de la Concorde.
Pour la finaliste de la présidentielle 2017, dont le parti est au coude-à-coude avec LREM dans les sondages pour les élections européennes, le gouvernement veut "détourner l'attention" des revendications des "gilets jaunes", qui réclament notamment une annulation des taxes sur les carburants et des mesures pour le pouvoir d'achat.
Prenant au mot M. Castaner, le vice-président du RN Steeve Briois a lui demandé de "rendre publique l'appartenance politique" des personnes interpellées à Paris.
- "Écouter" -
Le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan a estimé que "les petites polémiques sur 15 imbéciles aux Champs-Elysées ne concernaient pas les Français".
"C'est quand on est injuste, arrogant, méprisant comme l'est Emmanuel Macron que le désordre arrive", a déclaré sur TF1 l'ancien allié de Marine Le Pen à la présidentielle, qui réclame un référendum sur la fiscalité. Il fustige "une immense manipulation qui vise à discréditer (ceux) qui ne peuvent plus vivre de leur travail".
L'un des initiateurs du mouvement est un militant de DLF Frank Buhler, exclu du RN en juin et accusé de propos racistes.
Le premier vice-président des Républicains Guillaume Peltier a lui jugé "tellement facile" de "réduire ce mouvement à certains agissements inadmissibles" au lieu de "nous écouter". Le chef de LR Laurent Wauquiez, qui avait manifesté samedi dernier, ne défilait pas samedi.
A gauche, le leader de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon, dans une mauvaise passe depuis les perquisitions à son domicile et au parti, a contesté la volonté, selon lui, de M. Castaner de faire croire que "la manifestation des gilets jaunes soit d'extrême droite et peu nombreuse". "La vérité est que c'est la manifestation massive du peuple. Et ça, c'est la fin pour Castaner", a tweeté le député, qui participait à une autre manifestation contre les violences faites aux femmes.
- "Dialogue urgent" -
"Quand un mouvement est soutenu par les 3/4 des Français on lui répond", a estimé le Premier secrétaire du PS Olivier Faure. "Ce n'est pas en désignant ceux qui à l'ultradroite cherchent à récupérer le mouvement des gilets jaunes que le gouvernement stoppera la colère".
"Le gouvernement a joué la verticalité" en contournant syndicats et élus, a-t-il déploré. Le président, qui doit présenter mardi un "cap" pour la transition écologique, "doit s'exprimer d'urgence sur le pouvoir d'achat".
"Le dialogue est urgent" aussi pour le fondateur de Génération-s Benoît Hamon. Emmanuel Macron "ne peut plus réduire les +gilets jaunes+ à une protestation de fascistes, opposer progrès social et transition écologique".
Jusqu'ici en retrait, le PCF a clairement apporté son soutien aux "gilets jaunes" à son congrès.
Soutien de la majorité, le parti de la droite "constructive" Agir a estimé que "le ras-le-bol des Français dont les fins de mois sont difficiles doit être entendu et pris en considération".
Le chef de file des députés LREM Gilles Le Gendre a promis d'être "davantage à l'écoute" des "gilets jaunes", tout en réclamant une "extrême fermeté" pour les "casseurs de l'extrême droite" qui "salissent injustement le mouvement".
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