Finances des collectivités : un rapport sénatorial alerte sur la "crise de défiance" entre État et élus locaux

Suppression de la taxe d'habitation ou baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises: un rapport sénatorial alerte jeudi sur "la dégradation financière" des collectivités et "une crise de défiance" envers l'État à la veille du budget 2026.

Le sénateur écologiste Thomas Dossus, rapporteur d'une commission d'enquête sur la libre administration des collectivités, dénonce une "profonde crise de défiance" entre l'État et les collectivités, conséquence de "dix années de réformes fiscales" ayant progressivement réduit leur "autonomie financière".

Cette commission, demandée par le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, a été lancée dans un contexte de fortes tensions autour du projet de loi de finances 2025.

"Chaque projet de loi de finances est devenu un moment de tension extrême", a souligné le sénateur en conférence de presse. Il dénonce un "paysage illisible" et une "remise en question de la libre administration des collectivités".

Selon le rapport, la suppression de la taxe d'habitation ou encore la réduction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ont profondément désorganisé les recettes des collectivités, qui "ne tirent plus parti financièrement" du développement économique local ni de la construction de logements.

Les compensations apportées par l'État pour atténuer les effets de ces réformes fiscales n'ont pas permis de rétablir l'équilibre financier des collectivités et ont, selon le rapporteur, contribué à alourdir le déficit public.

"On estime le coût de ces réformes à 35 milliards d'euros quand on cherche aujourd'hui 40 milliards d'économies", a ironisé le sénateur du Rhône.

"On demande aux collectivités de contribuer au redressement des comptes publics, c'est une forme de double-peine car les leviers fiscaux ont été retirés", a-t-il souligné.

Le rapport appelle notamment à une réforme constitutionnelle pour redonner du sens au principe d'autonomie financière, estimant que le cadre actuel est une "coquille vide".

- Seize recommandations -

Il recommande aussi que les collectivités disposent de ressources sur lesquelles elles exercent un réel "pouvoir de taux ou d'assiette", et qu'"une autonomie en dépenses" soit garantie, en tenant compte des charges contraintes liées à leurs compétences, notamment sociales.

Enfin, le rapport alerte sur un "décalage énorme" entre les ambitions climatiques fixées par l'État et les moyens financiers réellement disponibles pour les collectivités.

Face à ce "mur d'investissements" nécessaires, le rapport recommande que chaque stratégie nationale - notamment en matière de transition et d'adaptation climatique - soit accompagnée d'une "analyse économique et financière territorialisée".

Il plaide également pour le maintien et la rationalisation des dotations efficaces comme le Fonds vert ou le Fonds chaleur, en introduisant des critères de performance écologique (comme le coût de la tonne de carbone évitée) pour guider les priorités d'investissement.

Au total, le rapport formule 16 recommandations, dont une révision régulière des compensations financières liées aux transferts de compétences, ainsi que la création d'un Conseil d'orientation des finances locales, en remplacement du comité des finances locales (CFL).