Essaimer des "rues-jardin" dans la capitale ? Les Parisiens appelés aux urnes pour la troisième fois

Les Parisiens veulent-ils plus de nature et de rues piétonnes près de chez eux ? Après les trottinettes en libre-service et la tarification des SUV, la mairie de Paris organise dimanche une nouvelle votation citoyenne sur les "rues-jardin", sujet plus consensuel même si l'opposition et certains riverains grincent déjà des dents.

Lors de ce scrutin, ouvert dès l'âge de 16 ans, les habitants de la capitale pourront se rendre dans 218 bureaux de vote pour dire s'ils sont "pour ou contre végétaliser et rendre piétonnes 500 nouvelles rues dans Paris". Et, en creux, la réduction de 10.000 places de stationnement.

Si le "oui" l'emporte, la municipalité promet de "massifier" la piétonnisation entreprise depuis le début du second mandat d'Anne Hidalgo en 2020, qui a déjà vu naître 300 rues du même type comme les "rues aux écoles".

"L'idée est que chaque Parisien puisse disposer d'une rue plantée et piétonne à moins de 300 mètres de son domicile", a expliqué à la presse Christophe Najdovski, adjoint à la maire socialiste chargé des espaces verts.

A partir d'avril, les voies éligibles seront identifiées à l'échelle des arrondissements, pour une mise en oeuvre d'ici trois ou quatre ans, avec l'objectif d'en déployer un quart dans les quartiers prioritaires de la ville.

Le coût moyen est estimé à 500.000 euros par rue, mais la totalité du projet n'est pas encore budgétée, a précisé le premier adjoint Patrick Bloche.

Le vote de dimanche "n'a rien de neutre, c'est un choix de modèle ville tendant vers une ville-jardin où la nature irrigue la ville et où la place de la voiture est réduite. Ca mérite d'être tranché", estime Christophe Najdovski.

"La voiture est un clivage majeur entre la gauche et la droite depuis 25 ans", abonde Patrick Bloche, évoquant les récentes mesures polémiques comme la vitesse à 50km/h sur le périphérique et la zone à trafic limitée (ZTL) dans l'hypercentre, visant à "apaiser" la capitale la plus dense d'Europe et diminuer la pollution.

Si les 500 rues-jardins voient le jour, 10% du stationnement de surface parisien disparaîtra. Une diminution déjà en cours dans certains quartiers comme la butte Montmartre (40.000 habitants), où la création d'une aire piétonne soulève la grogne de riverains.

- "Projet irréaliste" -

"La seule conséquence c'est de tuer l'accessibilité du quartier parce que les habitants, notamment les personnes âgées, ne pourront plus se garer en bas de chez eux", dénonce Anne Renaudie, présidente de l'association "Vivre à Montmartre", qui redoute une "disneylandisation" d'une des zones les plus touristiques de Paris.

Seuls 20% des foyers de la butte possèdent une voiture, rétorque Antoine Dupont, adjoint en charge de la voirie à la mairie du 18e arrondissement.

Affirmant que la mairie les a "mis devant le fait accompli après une pseudo-consultation de quartier", Anne Renaudie pronostique que de nombreux Montmartrois se rendront aux urnes dimanche pour dire "non".

La votation laisse également sceptique l'opposition de droite, qui met en avant le faible taux de participation de ces consultations - moins de 8% des électeurs s'étaient déplacés pour les référendums sur le triplement du tarif de stationnement des SUV, en 2024, et l'interdiction des trottinettes électriques en libre-service, un an plus tôt.

Le groupe Union capitale, premier groupe d'opposition au Conseil de Paris, estime qu'"aucune source de financement claire n'a été présentée" pour ces 500 nouvelles rues, un projet jugé "irréaliste" faute d'une "planification rigoureuse".

"Tout le monde a envie d'habiter dans une +rue-jardin+, mais quel sera la réalité ?", s'interroge de son côté Anne Biraben, du groupe Changer Paris de Rachida Dati, qui déplore le manque d'entretien des espaces verts dans la capitale.

Cette élue du 5e arrondissement prend pour exemple une récente votation de quartier sur la végétalisation de la rue Mouffetard. "Le résultat ne correspond pas aux dessins produits au moment du vote. La déception est immense", selon Anne Biraben.