Maquette du "Manta"
Environnement

Le "Manta", voilier géant collecteur de déchets plastiques, en cinq questions

Le "Manta", voilier géant destiné à lutter contre la pollution plastique océanique, continue sa mission de séduction auprès des mécènes du monde entier. Fonctionnement, missions, financements ... fiche d'identité de ce méga-projet. 

Quel est son objectif ? 

La mission principale du "Manta" est de collecter les déchets plastiques présents dans les océans avant qu'ils ne se décomposent en micro-particules. Cette pollution marine représente aujourd'hui environ 8 millions de tonnes de plastique rejetées chaque année dans la mer, provenant en grande partie de produits de consommation courante et de l'activité halieutique. 

Pour ce faire, le voilier sera équipé d'une grue, afin de capturer notamment les amas de filets de pêche, tandis que les petits déchets seront piégés entre les coques du bateau par des tapis roulants qui les feront remonter à bord. "Une fois les déchets collectés, une équipe d’opérateurs va les trier pour séparer le plastique et les matières organiques qui repartiront directement à la mer", explique Yvan Bourgnon, skipper suisse à l'origine du projet. 

Que deviennent les déchets ?

Ces déchets plastiques seront ensuite compactés en balles de 1m3. Au total, 600 balles pourront être stockées sur le navire, soit l'équivalent de 250 tonnes de plastique -pour une capacité de 5000 tonnes collectées chaque année- dont une partie sera ramenée à terre dans une filière de recyclage. Le reste sera utilisé pour augmenter l’autonomie du Manta, explique Yvan Bourgnon : "Le bateau sera équipé d’une pyrolyse, un incinérateur qui génère du carburant à partir du plastique non recyclable. A peu près 60 % des détritus ne seront pas recyclables parce qu’ils seront trop détériorés, trop mélangés aux algues... Plutôt que de les ramener à terre, où ils risquent de partir dans un circuit classique incinération ou enfouissement, nous avons cherché une solution pour les consommer à bord. C’est l’idée de la pyrolyse qui permet de de refaire fondre le plastique à l’état de pétrole, en circuit fermé et sans dégager de CO2 avec un rendement de 70 % environ. Cela permet d’avoir un cercle vertueux à bord du bateau".

Comment est alimenté le navire ?

L'association SeaCleaners, qui porte le projet, a fixé pour objectif une autonomie en énergie à 75 %. Pour cela, le Manta sera équipé, en plus de ses voiles, de 2000 m² de panneaux solaires et de deux éoliennes, qui permettront de produire 1 mégawatt d'électricité pour alimenter les hélices et l'usine embarquée. "Nous avons dissocié deux phases de propulsion. La première est la phase pendant laquelle le bateau collecte les déchets à faible vitesse, trois noeuds environ : il fonctionnera alors avec des moteurs électriques alimentés par les énergies renouvelables. La deuxième phase de propulsion correspond à la livraison des déchets à terre. Dans ce cas, nous utiliserons les quatre grands mats pour pouvoir rejoindre le port le plus rapidement possible".

Comment interviendra-t-il auprès des populations locales ? 

Aujourd'hui, "près de 90 % des plastiques retrouvés dans les océans proviendraient de seulement dix cours d'eau", tous situés en Asie et en Afrique, rapportait encore il y a quelques semaines Novethic. "En Europe, nous avons déjà réellement commencé à prendre en compte ce sujet, en développant l'économie circulaire ou le recyclage", analyse Yves Bourgnon. "Mais on se rend compte, quand on voyage en Amérique latine, en Asie du sud-est, ou encore en Afrique, qu'il n'y a pas encore cette conscience. L’ambition de SeaCleaners est donc également d’aller dans les zones les plus défavorisées afin de mobiliser les décideurs, les politiques, les chefs d’entreprises pour trouver des solutions pour mieux gérer les déchets. L’idée est aussi de mettre à leur disposition des pyrolyses dans les lieux où il n’y a pas d’unités de stockage du plastique". 

Où en est le projet ? 

Aujourd'hui, la campagne de financements du Manta est toujours en cours. A ce jour, elle a permis de rassembler environ 1/3 des 30 millions d'euros nécessaires pour achever le projet, dont la construction devrait débuter en 2020 pour un lancement en 2022. 

Mais SeaCleaners ne compte pas s'arrêter là. A terme, c'est une véritable flotte que voudrait voir parcourir les océans Yvan Bourgnon. "Avec cent bateaux bien répartis on commence à agir", confiait-il encore il y a peu au Parisien.