Le projet de loi de finances présenté mardi par le gouvernement, qui offre plusieurs avantages fiscaux aux agriculteurs, prévoit toutefois "la suppression du tarif particulier pour le carburant B100" (biogazole à base de colza), surtout utilisé par les transporteurs, et "la réduction progressive de l'avantage fiscal pour le carburant E85" (éthanol), produit notamment à partir de betteraves en France.
Cela représente une "hausse brutale de la fiscalité sur les biocarburants français d'origine agricole, le Superéthanol E85 et le B100, respectivement de 380% et 400%", alertent les organisations de producteurs affiliées au puissant syndicat FNSEA ainsi que les représentants des producteurs d'alcool agricole et de biodiesel.
Ces acteurs dénoncent une mesure "sans aucune concertation", qui aura "des répercussions graves pour les filières sucre, amidonnière et huile, dont la France est leader en Europe" et, in fine, sur les prix du carburant pour le consommateur et la décarbonation des transports.
Le Superéthanol E85 "contient jusqu'à 85% de bioéthanol, dont la France est le premier producteur européen, en utilisant près de 100% de matières premières françaises (blé, maïs, betterave, déchets et résidus de transformation et viniques)". Le B100 est lui "constitué à 100% de biodiesel produit à partir de colza français".
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Une source non négligeable de revenus
La hausse prévue de la fiscalité "fragiliserait le revenu de plus de 120.000 exploitants agricoles" et "compromettrait l'équilibre industriel des territoires en menaçant plus de 30.000 emplois", selon les filières.
Pour nombre de producteurs, la valorisation du colza, maïs ou betterave en agrocarburants constitue une source non négligeable de revenus, d'autant plus importante pour les céréaliers que les prix du blé et du maïs sur les marchés internationaux sont inférieurs à leurs coûts de production depuis des mois.
La production d'huile issue des grains de colza ou tournesol permet par exemple d'obtenir chaque année "plus d'un million de tonnes de tourteaux de colza", utilisé pour l'alimentation des animaux d'élevage, évitant "l'importation massive de tourteaux de soja et portant l'autonomie protéinique de la France à 55%, contre seulement 30% dans le reste de l'Union européenne", selon les filières.
Affaiblir ces filières, affirment-elles, reviendrait à favoriser, "paradoxalement, le retour aux carburants fossiles importés". Des fédérations professionnelles du transport routier de marchandises et de voyageurs (Union TLF, FNTR, OTRE et FNTV) ont elles aussi exprimé "leur vive inquiétude" dans un communiqué commun mercredi.
Les transporteurs affirment avoir "verdi" leurs flottes ces dernières années, "encouragés par les politiques publiques et les objectifs européens" reposant "sur un cadre fiscal stable et lisible" qui n'est plus garanti, plongeant "tout un secteur dans le trouble".
Avec AFP.