Du costume de Donald Trump à celui de maire de Tours: l'écologiste Emmanuel Denis a tracé sa route tourangelle à vélo et avec humour jusqu'à son élection vendredi à la tête de la plus grande ville du Centre-Val de Loire.
7 juin 2017 sur la place de la mairie: perruque jaune orangée sur la tête, cravate aux couleurs du drapeau américain, le conseiller municipal d'opposition harangue la foule pour sensibiliser sur la cause environnementale.
"J'aime bien me foutre de sa gueule", lance le désormais maire, un peu plus sérieux après son élection dimanche avec 54,77% des voix. "Les sujets environnementaux étaient moins à la mode, c'était une manière de ne pas se prendre la tête, de sourire des sujets politiques et de faire un petit buzz".
"Et je crois qu'en politique, il ne faut pas non plus se prendre trop au sérieux", avance celui qui a animé pendant plusieurs années les Lascars d'or, une cérémonie potache de remise du prix du projet municipal le plus inutile.
Côté caractère, ses proches collaborateurs estiment qu'il est "facile de travailler avec lui". Lui-même se dit "pas trop difficile d'accès" et se remettant "facilement en question".
"Je ne vais pas changer du tout au tout", assure l'ingénieur chez STMicroelectronics, âgé de 48 ans et père de trois enfants. "Après, on verra, mais dans un premier temps, je vais quand même essayer d'être sérieux. (... ) J'ai quand même fait attention pendant la campagne, car il y avait un procès en manque de compétence."
Un procès qu'il refuse en bloc: conseiller municipal et métropolitain depuis 2014, ce fervent partisan du deux-roues ("Pour l'instant je continue à prendre mon vélo, mais on verra dans quelques mois quand on me lancera des tomates!") estime avoir fait ses armes dans l'opposition.
- "La ville des quartiers" -
Avant de conquérir la mairie, l'ancien footballeur de niveau départemental a fait ses classes dans le milieu associatif. Bénévole dans une association de quartier au début des années 1990, l'élu rejoint le Secours populaire, puis la FCPE et Robin des toits (lutte contre les antennes-relais), avant d'adhérer à EELV en 2013, et d'entrer donc dans l'opposition en 2014.
Dans le prolongement de ses engagements militants, le natif de Tours obtient notamment l'arrêt des courses automobiles de la branche européenne du championnat Nascar organisée dans sa ville.
Désormais, en tête de ses préoccupations, il y a bien sûr l'environnement, le vélo, mais aussi les quartiers, dans la droite ligne de sa liste citoyenne et d'union de la gauche.
"J'ai grandi dans un quartier pavillonnaire en face d'un quartier HLM, à proximité d'un terrain de foot", raconte ce fils d'un ouvrier du Livre et d'une mère institutrice dans l'enseignement privé catholique. "J'ai passé toute ma jeunesse à jouer au foot avec les petits Maghrébins, plein de copains. Parallèlement, j'étais dans l'école de ma mère. Là c'était plutôt fils de médecin, etc. Ca me permet aussi de pouvoir naviguer dans tous les milieux sans trop de problème".
"On ne veut pas faire la ville du centre-ville, mais la ville des quartiers", affirme l'ancien milieu défensif, "C'est vraiment là-dessus qu'on nous attend. La tête sur les épaules et les pieds dans les quartiers".
"Moi, je suis un peu verni comme mec. J'étais pas hyper brillant, mais j'ai fait des études correctes, je suis devenu ingénieur, j'ai été embauché à STMicroelectronics. A un moment, je renvoie la balle", assure le nouvel édile.
Un membre de la nouvelle opposition le décrit comme "intelligent", plutôt un "homme de conviction" qui "n'a pas l'air d'être une girouette". Et de s'interroger sur l'avenir: saura-t-il évoluer dans un rôle plus rassembleur, avec une majorité qui va du NPA au PS ?
mam/gvy/pb