Des fruits et légumes sans pesticides, grâce aux serres et aux insectes

Comment cultiver des fruits et légumes en grande quantité sans utiliser de pesticides? Avec des serres et des insectes, de grands maraîchers français développent des techniques et des labels destinés à répondre à la demande des consommateurs.

Sur la défensive depuis la publication d'une étude pointant la présence de traces de pesticides dans trois quarts des fruits et 41% des légumes non bio, l'interprofession française des fruits et légumes, Interfel, a rappelé lundi au salon de l'Agriculture à Paris que son objectif était de parvenir à réduire de 20 à 50% le recours aux produits phytosanitaires de synthèse d'ici à 2030.

Selon l'étude publiée par Générations Futures la semaine passée, 2,7% des échantillons de fruits analysés par la DGCCRF présentent des taux de pesticides supérieurs aux limites maximales de résidus (LMR) autorisés, seuils légaux fixés par l'Union européenne.

"97,3% de nos produits sont conformes. C'est comme si on reprochait à un élève qui a 19,5/20 au bac d'être un cancre", a réagi lundi Christian Berthe, président de l'Union nationale du commerce de gros des fruits et légumes.

Il exprimait le "désarroi" d'une partie de la profession, qui se vit comme "attaquée", alors qu'elle croyait être une bonne élève au sein des producteurs français en terme d'environnement.

"Nous avons fait d'énormes efforts depuis plusieurs années et nous savons très bien que demain nous devons tendre vers une réduction systématique des pesticides", ajoute Jacques Rouchaussé, président de Légumes de France.

Néanmoins, il est "impossible" selon lui de parvenir à une réduction totale pour les 130 catégories de fruits et légumes répertoriées dans l'interprofession, du persil au potiron en passant par la pomme, la myrtille, l'endive et le champignon.

"Plus on est dans des cultures de plein champ et de plein air, plus c'est difficile de s'en passer, car "l'environnement devient de plus en plus agressif", explique Louis Orenga, directeur général d'Interfel.

- 15 à 20% plus cher -

Lorsque la mouche drosophile suzuki, ravageur des cerises et des fraises s'approche des cultures, "cela ne nous facilite pas la vie", dit André Bouchut, membre du syndicat agricole Confédération Paysanne qui milite pourtant pour la suppression totale des pesticides: "C'est notre rêve, mais ce n'est pas toujours possible", dit-il.

Des solutions "venues de la base" des producteurs et maraîchers se dessinent, essentiellement pour les cultures sous serre.

La coopérative bretonne Saveol, spécialisée dans les tomates, a ainsi présenté lundi sa gamme de tomates "cultivées sans pesticides", qui offrira une double garantie: "cultivée sans pesticide de la floraison à la récolte" et présentant "zéro résidu de pesticide" à la consommation.

"C'est une démarche très engageante pour nos producteurs, car elle nécessite des formations pour détecter les maladies, une gestion préventive des maladies en introduisant des insectes comme les macrolophus dans les serres pour tuer certains ravageurs, et d'un coût légèrement supérieur", a dit son président Pierre-Yves Jestin lors d'une rencontre avec la presse.

En 2018, 30 à 40% de la production de Saveol devrait être vendue en "sans pesticides" avec 12 références.

"Si nous devions avoir recours à un traitement chimique, en raison d'aléas climatiques par exemple, les tomates seraient alors commercialisées en conventionnel", a-t-il précisé.

Saveol pense vendre cette nouvelle gamme "entre 15 et 20%" plus cher que les tomates conventionnelles.

La coopérative a par ailleurs annoncé lundi la constitution d'un "collectif" avec deux autres producteurs bretons Solaresse et Prince de Bretagne, en vue de créer un label régional commun "sans pesticide" d'ici à 2019.

Autre initiative collective, celle annoncée début février autour de l'autre grand producteur de tomates Rougeline, qui garantit avec sept autres maraîchers et arboriculteurs français de plusieurs régions "zéro résidu de pesticides" dans ses productions. Certaines sous serres, d'autres pas.

Un logo rond, blanc sur fond vert, sera apposé sur les fruits et légumes répondant à un cahier des charges contrôlé de façon indépendante, a dit à l'AFP Gilles Bertrandias, président du collectif "Nouveaux Champs".

Outre Rougeline, les six entreprises fondatrices sont Blue Whale (pommes) basée à Montauban, Oceane (tomates, concombre, mâches, poireaux..) près de Nantes, Pomme Alliance (pommes de terre) à Orly, Larrère (carottes) dans les Landes, Fruits et Compagnie (fruits à noyaux, fruits à pépin) dans le Gard, et Lindor (Pommes golden) dans le Limousin.

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