Dernière ligne droite du marathon sur l'asile-immigration à l'Assemblée

Les débats passionnels sur l'asile-immigration à l'Assemblée nationale semblent dimanche dans la dernière ligne droite et le vote à l'horizon, un assouplissement du "délit de solidarité" faisant espérer aux ténors LREM un minimum de voix contestataires dans leurs rangs.

Après plus de 50 heures de débat, restaient en discussion en milieu d'après-midi une dizaine d'articles et près de 200 amendements sur le millier déposés sur ce projet de loi "pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie". Dans l'hémicycle siégeaient toujours plus d'une centaine de députés, chaque camp vantant sa "mobilisation".

Ce travail dominical est inédit, hors période budgétaire, depuis l'homérique bataille du "mariage pour tous" de 2013.

Extrêmement combatives, quasiment un an après l'élection d'Emmanuel Macron, les oppositions -LR et FN d'un côté, Insoumis, communistes et socialistes de l'autre- ont fait prolonger les débats. Tous ont régulièrement dénoncé un vote "en catimini" et réclamé, en vain, un scrutin solennel le 9 mai, après les vacances parlementaires.

Mais "on ira jusqu'au bout et on votera tôt ou tard", a prévenu samedi le chef de file LREM Richard Ferrand.

Dès le coup d'envoi des débats, lundi soir, le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb avait plaidé "l'urgence à réagir", sur fond de "crise migratoire" en Europe, pour limiter "une immigration massive" et "en même temps" garantir le droit d'asile, "sacré".

La rapporteure Elise Fajgeles (LREM) a souvent insisté sur une "ligne de crête", entre "exigence de pragmatisme" et "humanité", martelant l'"équilibre" du texte.

Critiquant une "petite loi" d'une majorité "immigrationniste" et des "pudeurs de violette" du ministre, les Républicains ont bataillé pour durcir le texte. Le groupe votera contre: "sur ces sujets, Macron, c'est du Hollande en pire, il aggrave la législation actuelle", accuse Christian Jacob.

Les LR n'ont aussi cessé de demander au gouvernement s'il y avait "un plan dissimulé pour régulariser 40.000 étrangers en situation irrégulière".

- Mort du petit cheval -

La présidente du FN Marine Le Pen a, elle, fustigé une "loi d'organisation d'une immigration supplémentaire" et raillé le patron de LR Laurent Wauquiez, "mis sous (s)on aile, en quelque sorte" avec les propositions de son parti.

Vent debout contre une loi "inhumaine", la gauche a combattu des "régressions", comme le doublement de la durée maximale de rétention, portée à 90 jours, et dénoncé aussi la possibilité maintenue "d'enfants derrière les barbelés". La gauche a régulièrement accusé la majorité de faire "le bonheur de la droite et de l'extrême droite" et LR de "jouer à l'idiot utile du macronisme et faire passer une loi extrême pour une loi équilibrée".

L'une des mesures phare -réduction de moitié du délai d'appel à 15 jours après rejet d'une demande d'asile- a été votée par le FN, inhabituellement présent en nombre dans l'hémicycle, Marine Le Pen comprise, un "tournant" historique selon Olivier Faure (PS).

Si le gouvernement affiche le double objectif d'entamer rapidement le travail d'intégration des réfugiés et de faciliter la reconduite à la frontière des déboutés, la gauche, mais aussi certains députés LREM-MoDem, dénoncent une atteinte aux droits de la défense.

Au long des débats, la frange contestataire LREM, avec quelques MoDem, jouait les équilibristes pour faire entendre sa défense des "vulnérables" sans paraître "fronder".

Plusieurs LREM ont confirmé qu'ils s'abstiendraient, malgré "des avancées" dans l'hémicycle. Seul Jean-Michel Clément a réaffirmé qu'il voterait contre. Il pourrait devoir quitter le groupe, selon la règle fixée par Richard Ferrand ("abstention, péché véniel, vote contre, péché mortel"), qui rompt selon Sonia Krimi avec la "bienveillance" macroniste.

Une dizaine, voire moins, de suffrages "marcheurs" discordants, "ce ne sera pas la mort du petit cheval", a minimisé Gilles Le Gendre, vice-président LREM.

Dans les dernières heures, encore émaillées d'invectives, un point sensible y compris pour ces élus a été modifié. A une très large majorité, l'Assemblée a voté l'assouplissement du "délit de solidarité" pour certaines personnes venant en aide aux migrants.

Cela "permet à des gens nombreux qui, de toute façon, s'apprêtaient à voter pour, de respirer beaucoup mieux", selon M. Le Gendre, LR épinglant "un recul du gouvernement devant la pression de l'aile gauche".

Un autre amendement LREM ramène à six mois le délai pour accéder au marché du travail pour les demandeurs d'asile.

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