Déforestation: il est "urgent" de sortir du "flou" sur le soja, selon les fabricants d'aliments pour le bétail

Le syndicat français de l'industrie de l'alimentation animale (Snia) a appelé jeudi à clarifier d'urgence les conditions européennes "complexes et floues" fixées pour l'importation de soja garanti non issu de la déforestation, faisant état d'un possible "surcoût de 2,2 milliards d'euros au niveau européen".

Ce règlement européen (RDUE) vise à interdire, à partir de 2025, l'importation de café, cacao, caoutchouc, huile de palme, boeuf, bois et soja ayant contribué à la déforestation.

Mais ses modalités d'application sont encore floues, notamment sur les moyens de certifier le soja importé non-déforestant, et la Commission européenne doit encore publier "des détails de mise en oeuvre": "à trois mois de la mise en place du règlement, c'est totalement irresponsable", a protesté Ludovic Michel, vice-président du Snia, lors d'une conférence de presse à Paris.

"Sans ces modalités d'application, les fournisseurs ne peuvent pas se positionner (...). Nous sommes face à un vrai risque de rupture de la chaîne d'approvisionnement, avec les coûts désastreux (...). Et pendant ce temps-là, il sera toujours possible d'importer des poulets de pays tiers qui auront consommé du soja sans traçabilité", a-t-il déploré.

Le Snia se réfère à l'estimation par sa fédération européenne (Fefac) de "l'impact combiné du surcoût direct des approvisionnements en soja pour le marché de l'alimentation animale de l'UE" et "des surcoûts plus élevés prévus pour d'autres sources de protéines alternatives (tourteaux de colza ou acides aminés)", qui "pourraient atteindre jusqu'à 2,25 milliards d'euros" en 2025.

"Le point dur de ce règlement, c'est la géolocalisation des parcelles au niveau des pays qui fournissent le soja à l'Europe", a expliqué Stéphane Radet, directeur du Snia.

Si un pays comme le Brésil sera sans doute prêt avant les autres, les exigences en matière de traçabilité sont beaucoup plus complexes à mettre en oeuvre au Nigeria ou en Inde.

Or pour des filières comme l'élevage bio, exigeant un soja non-OGM par exemple - et donc venant d'autres pays que le Brésil -, il deviendra très difficile de répondre à la demande, alors que "les productions nationale et européenne ne satisfont pas la totalité des besoins", a souligné M Radet.

En France, les fabricants assurent que, selon des critères qu'ils ont développés, plus de 75% du soja utilisé est déjà garanti non-déforestant, mais ces dispositions ne sont pas reconnues au niveau européen, déplore le Snia.

Le syndicat appelle les autorités à faire preuve de "pragmatisme et de responsabilité" pour "permettre la continuité de l'approvisionnement en soja".

La graine oléagineuse représente 14% des utilisations de matières premières utilisés par les fabricants, qui ont produit en 2023 plus de 19 millions de tonnes d'aliments pour bétail.

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