L'ancienne mine de Salau, dans les Pyrénées, attise les convoitises: deux sociétés envisagent de reprendre l'exploitation de son gisement de tungstène, un métal stratégique dont le prix a récemment flambé en raison de son utilisation par l'industrie de défense.
Les dirigeants de Neometal, qui avaient déposé une demande de permis d'exploration en juin 2024, ont détaillé leur projet jeudi, lors d'une conférence de presse à Foix. Il comprend aussi la création d'une usine de traitement de ce métal.
"Le gisement de la montagne ariégeoise, c'est un vrai gisement de tungstène. C'est un gisement de classe mondiale, (...) très important par son volume et sa teneur" en minerai, affirme le directeur général de Neometal, Serge Dallas, un ancien du Bureau français de recherches géologiques et minières (BRGM) et du cimentier Lafarge.
Une autre société minière concurrente, dont le nom n'est pas connu, s'est également positionnée pour solliciter un droit d'explorer pour la mine de Salau, à Couflens (Ariège), fermée depuis 1986, victime du dumping chinois.
La Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) doit rendre sa décision "fin 2026", selon le directeur général de Neometal.
- Minerai stratégique -
Utilisé par l'industrie spatiale, pour l'outillage ou l'imagerie médicale, le tungstène revêt désormais, comme d'autres métaux et terres rares, une importance accrue. En avril, Pékin a restreint les exportations de ce métal et de sept catégories de terres rares pour riposter aux droits de douane américains.
La demande de permis exclusif de recherches de mines (PERM) déposée par Neometal le 20 juin 2024, baptisée "Montagne ariégeoise", concerne une zone d'une centaine de km2 sur les communes de Couflens, Ustou, Aulus-les-Bains et Auzat.
Un premier PERM avait été délivré en 2016 à une autre société, Variscan Mines, mais avait été annulé par la justice administrative après la mobilisation de défenseurs de l'environnement.
"Il n'y a pas un contexte facile en France en ce moment vis-à-vis des projets miniers", a estimé jeudi M. Dallas.
- Horizon 2033 -
L'octroi d'un permis ne serait toutefois qu'une première étape. Ce permis est valide cinq ans, mais Neometal espère réunir en seulement trois ans "les informations complémentaires dont on a besoin pour élaborer la faisabilité du projet minier". Il faudra ensuite obtenir un permis d'exploitation, puis réaménager la mine ou en ouvrir une nouvelle, le tout pour une éventuelle mise en service à la mi-2033.
Le projet de Neometal, basé sur l'hypothèse d'une extraction de 2.000 à 3.000 tonnes de tungstène par an, selon M. Dallas, prévoit, en cas d'un gisement suffisamment important, l'installation d'une usine de traitement de ce métal dans la région, "à quelques dizaines de kilomètres" de Couflens.
On ne compte que 14 usines de ce type dans le monde, avance le directeur général, dont 12 en Chine, premier producteur mondial de tungstène. "On cherche à transformer l'industrie du tungstène en France et en Europe", explique Emmanuel Henry, le président de Neometal.
Le directeur général évoque "quelques centaines" d'emplois si son projet aboutit.
Le projet rencontre une opposition véhémente de la part d'associations de défense de l'environnement, dont le collectif "Stop Mine Salau", qui ont manifesté à Foix le 24 mai et ont également protesté jeudi contre la tenue de la conférence de presse.