Conditionner une subvention ou un contrat de sponsoring à la performance environnementale: le monde du sport est de plus en plus poussé à réduire son bilan carbone, lesté en particulier par les déplacements des joueurs et des spectateurs.
"Il y a quelques années, il suffisait de proposer des verres en plastique réutilisables et de faire réaliser un bilan carbone sans même forcément avoir réduit son empreinte carbone! Mais maintenant les exigences environnementales sont fortes, cela devient incontournable et plus aucun événement sportif ne peut s'en affranchir", résume pour l'AFP Maël Besson, expert climat et sport.
Ce spécialiste de la transition écologiste a notamment participé à la rédaction d'une Charte de 15 engagements pour réduire l'impact environnemental, appliquée progressivement depuis 2017 par le ministère des Sports aux organisateurs d'événements sportifs, aux gestionnaires d'équipements ou encore aux fédérations sportives et ligues professionnelles.
Ces dernières ont remis en juin au gouvernement un "plan d'actions" qui les engage entre autres à remplacer d'ici quatre ans "95% des trajets en avion qui sont réalisables en moins de cinq heures porte à porte par d'autres moyens de transport" ou encore "les distributions gratuites de bouteilles en plastique".
Plus largement, ce principe d'"éco-conditionnalité" est contenu dans le Plan national d'adaptation des pratiques sportives au changement climatique, publié en décembre 2024, qui lie les aides accordées par les pouvoirs publics au monde sportif - pour la construction d'équipements par exemple - à des critères de résilience au changement climatique.
"Et si en plus, il y a des partenaires privés et des sponsors qui deviennent attentifs sur ces sujets-là, ça remet une pression" sur le monde du sport, résume Maël Besson.
Mercredi, l'assureur Maif - partenaire de huit fédérations sportives - a annoncé que ses contrats dans le sponsoring conditionnaient désormais son financement à des critères de performance environnementale: "Si les objectifs sont atteints, il y aura perception d'un bonus", a détaillé Yves Pellicier, président du groupe, qui tient à souligner que c'est tout sauf "de l'écologie punitive".
- "Donner l'impulsion" -
Pour Eric Tanguy, président de la Fédération française de volley (FFVB), en partenariat avec l'assureur, "c'est important de nous challenger et de donner l'impulsion pour faire mieux car ce n'est pas toujours facile, on est dépendants de lieux de compétitions: cette année on a eu des championnats du monde aux Philippines, en Thaïlande et en Australie. Donc niveau déplacements c'est pas génial, mais on peut faire des choses à côté pour compenser".
Cédric Gosse, président de la Fédération de triathlon également lié à la Maif, estime lui qu'il faut mettre "au même niveau performance sportive et performance écologique" et cet engagement se traduit concrètement au niveau du tri des déchets ou de l'abandon du plastique, le triathlon étant "directement confronté au réchauffement des eaux, au développement des algues".
Du côté des grands sponsors privés, Orange, EDF, Accor et Sodexo ont signé en 2023 l'initiative "Sport Sponsors Climate Pledge", qui lie à des objectifs de réduction des émissions carbone leur soutien financier à des organisations sportives.
EDF précise à l'AFP avoir notamment appliqué cette démarche lors des Jeux de Paris-2024 et dans le cadre de ses partenariats avec la fédération de natation et celle de handisport.
L'"éco-conditionnalité" existe également dans le football: en 2023, la Ligue de foot professionnel (LFP) a introduit des critères sociaux et environnementaux pour l'obtention de sa licence club en Ligue 1 et Ligue 2, qui pèsent pour environ 11% des points nécessaires par exemple pour toucher l'intégralité des droits TV.
Selon un rapport du Shift Project, groupe de réflexion dirigé par Jean-Marc Jancovici, publié début 2025, le foot et le rugby (professionnel et amateur) à eux seuls ont cumulé un bilan carbone de 2,2 millions de tonnes équivalent CO2 en 2022-2023, soit autant que "les émissions annuelles des habitants d'une ville comme Rennes ou Lille".
Le poste le plus important (80% des émissions) est le transport des spectateurs et des équipes sportives, mais le rapport prend aussi en compte les kilowattheures consommés dans les stades ou encore le nombre de sandwiches ou hot-dogs vendus.
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